REDLINE : What do we say to the god of reason? Not today
Aujourd’hui je m’adresse à vous, oui, vous, les fanas du turbo, les gens qui n’écoutent que des tempêtes de moteurs et dont le besoin de vitesse est insatiable. Vous qui ne jouez à Mario Kart qu’avec un seul objectif en tête : battre cette fichue carapace bleue. Je m’adresse aussi à ceux qui, il y a maintenant bien longtemps, lorsqu’ils ont vu pour la première fois Star Wars Episode 1 se sont dit que la course de pod aurait dû être un film entier. A vous, je vous dis : bienvenue dans le monde des films de course !
Ce genre si particulier où les pires crimes et les pires injustices se règlent à coup de volant, de chronos qui explosent et de chevaux déchainés.
Ce genre de film, il en existe des dizaines, du super célèbre Fast and Furious jusqu’au papy du genre Vanishing Point (une heure dix de course poursuite sans dialogue sur un film d’un peu plus d’une heure et demi, ils n’avaient peur de rien dans les années 70). Il possède même ses parodies (Ricky Bobby, roi du circuit) et ses versions pour enfant (Cars), bref il ne faut pas croire mais c’est un vrai genre à part entière, à l’instar du slasher ou du film de zombie avec ses codes et ses archétypes. De tout ça, il ressort deux maîtres absolus, incontestables et incontournables, deux films qui resteront à jamais dans les mémoires de leurs spectateurs alors que tout le monde a oublié de quoi parlait 60 secondes chrono, j’ai nommé : Redline et Speed Racer des Wachowsky. Cette chronique est consacrée au premier.
La prouesse technique comme ligne de conduite
Redline de Takeshi Koiike est le fruit de sept années de travail acharné depuis sa conception jusqu’à sa sortie, même pour un film d’animation ce temps de gestation est incroyablement long. Pourquoi une telle durée? Déjà parce qu’il s’agit d’un travail original et non d’une adaptation d’un manga ce qui, de la part d’un anime japonais est quand même plutôt rare mais surtout à cause de la méthode qu’ils ont employé pour créer le film: Ils ont décidé de tout dessiner à la main et seulement faire des retouches grâce à l’ordinateur et encore sans employer de système pratique pour uniformiser les images, ils ont tout fait image par image, détails par détails.
En toute honnêteté, quand on voit le résultat, on peine à croire que tout ça a d’abord été fait à la main, qu’avec uniquement du papier et des crayons on puisse obtenir une telle qualité d’animation, une telle effervescence de détails bien au delà de ce que je qualifiais presque de dieu de l’animation, l’anime Attack on Titan. Ici la différence est sans commune mesure, ce serait comparer la berline un peu classe de votre docteur à une F1, surtout qu’en plus les animateurs d’Attack on Titan, pour gagner du temps, ne se sont pas privés d’utiliser à fond les ballons leurs ordinateurs !
Enfin trêve de compliment, je vous propose de voir ça par vous même en regardant la bande annonce du film.
Dépasser toutes les limites comme unique but
Redline est le film peut-être le plus déjanté (c’est le cas de le dire) que j’ai vu de ma vie.
Pour me faire comprendre, je vais vous donner le pitch : Dans un futur lointain, où l’humanité a conquis l’espace, des malades organisent encore des courses de voitures, avec comme seule règle de ne pas utiliser des moteurs à anti-gravité, mais des moteurs à explosion, des vrais, de ceux qui fument et qui sentent bon l’essence et l’huile et le tout monté sur des vraies roues, pour faire des vrais dérapages etc… Et dans cette discipline la Redline est la course ultime, le rally le plus incroyable où seuls les plus grands pilotes de la galaxie sont conviés.
les effets de vitesse sont superbes
Cette année, la Redline est organisé sur Roboworld. Sauf que Roboworld, ils n’étaient pas au courant et ils ne sont pas d’accord, et comme c’est une grosse dictature militariste quand ils disent « non » c’est par les armes qu’ils se font comprendre. Mais ça, les organisateurs et les pilotes, ils en ont rien à faire, ils vont quand même la faire leur course et advienne que pourra, ça fera un beau spectacle ! C’est un peu comme si on décidait d’organiser le Paris Dakar en Corée du Nord, sans l’accord de la Corée du Nord. Même en tant que troll je dois avouer que je suis sincèrement impressionné par l’inconscience provocatrice des organisateurs.
les tronches des pilotes sont incroyables
JP, le héros de l’histoire, est bien sûr un pilote, extrêmement doué, mais victime d’accords véreux entre son mécano et la mafia, il est condamné à arriver systématiquement deuxième des courses auxquelles il participe. Pour des raisons que je ne vais pas vous raconter, il parvient malgré tout à se qualifier à la Redline et c’est par son biais que l’on va pouvoir rencontrer les autres protagonistes de l’histoire. Des personnages tous très haut en couleur et exubérants, avec leur style de conduite et des véhicules incroyables mais, comme souvent dans les films de courses, ils sont très en retrait par rapport au héros. Pour pallier à ce manque le réalisateur a décidé d’intégrer au film, pour chacun d’eux, une sorte de vidéo de présentation complètement folle et surtout, ils possèdent chacun un jingle qui retentit lorsqu’ils apparaissent à l’écran et ça c’est juste hallucinant. C’est aussi le moment où il rencontre Sonoshee Mc Laren, l’héroïne, une fille passionnée de course qui ne vit que pour gagner, dont il tombe évidemment amoureux.
Une course comme aucune autre
Arrive enfin le moment qu’on attend depuis le début du film, la course, Redline.
Dès le départ de la course le ton est donné. Roboworld attaque les pilotes au laser orbital, ils sont lâchés en chute libre sur une base militaire, se tirent dessus entre eux et ce n’est que le début. Ce que vous allez voir pendant cette séquence de course va vous scotcher à votre fauteuil, vous faire rire, vous faire halluciner le tout à un rythme effréné. Toujours, toujours plus vite à grand renfort de déformation des corps et des visages à chaque coup d’accélérateur, de perte de contrôle des véhicules, de jets de poussière immenses derrière les concurrents et toujours, toujours dans la surenchère avec une armée qui va attaquer les coureurs avec des champs de mines qui malgré leurs explosions instantanées se révèlent inefficaces tellement les pilotes vont vite, des bombardements aériens, des barrages, des lasers jusqu’aux armes de destruction massive dans le but de les arrêter… sans succès.
La liberté absolue de ces pilotes les rend invulnérables, intouchables, ce pied de nez continu qu’ils font à cette dictature transforment cette bande de débiles en ambassadeurs d’un monde qui ne saurait se soumettre. Cette course dépasse son propre cadre pour devenir autre chose, quelque chose de plus grand, de plus important, comme ce film, elle ne peut pas rester en place, il faut qu’elle brise ses propres limites, qu’elle se déchaine dans tout son enthousiasme et son exubérance.
Jusqu’à la toute fin ce film va essayer de vous émerveiller, de vous surprendre et en même temps sans jamais lâcher la pression, faire redescendre le suspense : vont-ils réussir à finir en vie cette course de l’impossible? JP va t’il nous faire une Rocky et s’effondrer dans le dernier round ?
Ce sera bien sûr à vous de le découvrir en regardant ce chef d’œuvre !
Redline est une œuvre complète, qui a demandé à ses auteurs Katsuhito Ishii et Takeshi Koike et au reste du studio Madhouse de se dépasser techniquement, à son compositeur James Shimoji de se déchainer musicalement, avec un thème pour chaque pilote, pour chaque course avec chacun son ambiance et son style musical (la BO du film est impressionnante par sa diversité) et qui propose à ses spectateurs un monde incroyable, étrangement crédible dans sa démesure. Bref, la course la plus impressionnante qu’il est possible d’imaginer (enfin je crois).
La frénésie de son rythme, la saturation des images par des dizaines de détails qui demandent plusieurs visionnages pour être tous aperçus et ses designs très particuliers pourront sûrement en rebuter plus d’un mais pour ceux qui se laisseront emmener dans cette histoire, je garantis un voyage dont ils ne sont pas prêts de se remettre !
La première fois que j’ai vu ce film, à la toute fin même après le générique je suis resté au fond de mon canapé, encore sous le choc et avec une seule question dans la tête: « Mais qu’est-ce que je viens de regarder? »