VINDICTA : Quand l’écriture se teinte d’un rouge sublime

cedric-sire-2019-1584856 Parce que j’aime bien mettre la tronche des auteurs  ©Métropolis Noir

Cela faisait longtemps que j’attendais une bonne excuse pour vous parler de lui, MON auteur favori, j’ai nommé Cédric Sire.
Cet auteur, je l’ai découvert il y a maintenant dix ans, au gré de mes nombreuses errances en librairie pour satisfaire ma soif d’histoires extraordinaires.

Peut-être le connaissiez-vous en tant qu’auteur de thrillers fantastiques, mêlant avec talent enquêtes policières et surnaturel. Oui mais ça, c’était avant, car Cédric Sire a pris un nouveau tournant dans son écriture et a décidé de mettre de côté le surnaturel pour ne se consacrer qu’au polar noir. Et cela fonctionne ! Je n’ai jamais été déçue par son écriture et c’est toujours avec une immense impatience que j’attends la sortie de son prochain roman. Celui-ci n’a pas fait exception.

C’est donc enfin, après deux longues années d’attente, que la bonne nouvelle est arrivée : sa dernière merveille Vindicta, sorti en mars dernier. Il est temps pour vous de dire adieu à vos nuits paisibles et de vous laisser happer par ce roman au suspense infernal.

Suspense ? On a dit suspense ?

Vindicta, c’est au premier abord, trois histoires parallèles sans rapport direct les unes avec les autres.
Une bande de quatre jeunes qui décident d’organiser le braquage d’un bijoutier parce que dans les films c’est trop facile de ressortir avec plein de fric (franchement les gars, vous croyez vraiment que ça va marcher ?). Un ancien flic de la Criminelle accro aux joints relégué à une pauvre cellule de surveillance pour vol de preuves (un mec charmant quoi). Et un homme, tellement froid, sadique et méthodique dans la pratique de sa vengeance dont on ignore encore tout, que l’on se demande parfois s’il est réellement humain (vous allez adorer passer du temps avec lui).

Dès le début du roman, Cédric Sire ne cherche pas à mentir à son lecteur, on sait pertinemment que cette histoire va mal se finir. C’est alors une sorte de curiosité malsaine, mais pourtant si délicieuse, qui va bien entendu nous pousser à aller au bout de cette lecture.

Tout d’abord, l’auteur nous laisse doucement apprivoiser ses personnages, leurs forces, leurs faiblesses, leurs rêves. On s’attache à l’un, on s’identifie à l’autre et soyons honnêtes, on les prend aussi un peu en pitié car de base, leur quotidien n’est pas franchement tout rose. Voici donc une bonne raison pour que tous ces personnages aient envie de s’extirper de tout ça, d’une manière ou d’une autre. Bref, ils sont humains tout simplement, et même si ce ne sont pas les êtres les plus adorables de l’univers, on n’a pas tellement envie que ça se passe mal pour eux. Au fond, ils sont juste un peu tous désespérés.
Donc, une fois que toi, pauvre lecteur as bien eu le temps de t’habituer à tous ces personnages, l’heure du braquage arrive et comme prévu, le plan déraille et nos quatre pauvres jeunes se retrouvent subitement les cibles numéro un du monstre sanguinaire. C’est là que l’histoire prend un nouveau tournant et s’accélère.

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Le succès de ce roman repose sur la mise en place d’un suspense quasi insoutenable que l’auteur maintien avec brio tout au long de ses 592 pages. Franchement, il faut le faire ! La question n’est pas de savoir si les personnages vont s’en sortir, mais qui va y passer et quand ? (et aussi comment, mais promis, on va vite y revenir !) Car dans le roman de Cédric Sire, personne n’est à l’abri du tueur de l’ombre.

Tant et si bien que j’avais même parfois l’impression que son faciès sans trait m’observait derrière ma fenêtre pendant que mes yeux parcouraient avidement les pages de ce roman infernal. Pas génial pour dormir, mais impressionnant.
J’ai d’ailleurs toujours admiré ces auteurs qui étaient capable de créer une angoisse telle que, une fois le livre posé, tu te sentes obligé de regarder s’il n’y a rien ni personne sous ton lit avant d’aller te coucher.  Cédric Sire fait clairement parti de cette catégorie d’auteur et c’est pour ça que j’y reviens toujours avec le même plaisir.

Quand l’horreur nourrit le polar

Vous l’aurez compris, on n’a pas tellement envie que les personnages meurent et l’idée qu’un meurtrier soit à leur poursuite ne nous enchante guère en tant que lecteur.
Seulement, la voilà l’essence de tout ce roman, nous n’avons pas affaire à un simple tueur. Ce personnage est bien plus proche d’un spectre que d’un humain. On apprend d’ailleurs qu’au fil de ses expériences, il a pu se conditionner pour ne rien ressentir et ne jamais flancher. Il est impitoyable, surentrainé, rien ne peut le détourner de son objectif. Il y a de quoi avoir froid dans le dos !

Mais Cédric Sire ne s’arrête pas là. Il pousse la peur à son paroxysme. Là où d’autres auteurs s’arrêteront à quelques détails peu ragoûtant, Cédric lui, ne va jamais ménager son lecteur. Tout ce que le meurtrier entreprend, le lecteur va y assister malgré lui, c’est comme ça. Âmes sensibles s’abstenir, les scènes sont d’une réalité monstrueuse. Il y a du sang, de la chair, des boyaux… bref si vous aimez les licornes et les paillettes, passez votre chemin !
Pourtant grande habituée du gore et des meurtriers sanguinaires, je ne mâche vraiment pas mes mots en disant que Vindicta saura toucher les plus solides d’entre nous.

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Attention cependant, ce n’est pas pour autant de la violence gratuite. L’utilisation du gore est parfaitement utile à l’histoire car c’est en totale adéquation avec le caractère du meurtrier. Il n’a pas de pitié, il n’a plus aucune humanité et souhaite se venger. Forcément, ça ne peut pas être beau à voir. Cédric Sire ne décrit pas gratuitement comme ça des intestins qui volent à l’air libre ou autre torture, c’est son protagoniste qui est comme ça, il ne pourrait donc pas le censurer ou le décrire autrement, cela n’aurait absolument aucun sens. Son personnage n’a aucune limite, son écriture ne peut donc en avoir aucune !

A chaque sortie de roman, Cédric Sire améliore son écriture et cela se ressent très bien dans ses descriptions. On est bien loin du « il lui déchiqueta le sternum d’un coup de poignard et dans un affreux craquement lui ouvrit la cage thoracique » et heureusement.
J’ai trouvé qu’il y avait réellement une forme de sublime dans sa manière de faire couler le sang et d’imposer à ses personnages des tortures insoutenables. Il arrive à instaurer une certaine beauté dans la cruauté de son meurtrier qui a su me laisser sans voix à de nombreuses reprises.

Enfin, les descriptions des scènes de meurtre permettent aussi de maintenir le lecteur à bout de souffle. Le suspense ne serait pas aussi intense si les personnages étaient poursuivis par un simple sniper. A chaque nouvelle vengeance, le lecteur prend conscience de ce dont le tueur est capable et la peur se construit crescendo. Plus l’histoire avance, plus le meurtrier fait preuve de violence, plus le lecteur anticipe avec angoisse le moment où il piégera le prochain personnage. C’est donc en ça aussi que l’utilisation du gore est primordiale. Les descriptions horrifiques sont à la hauteur du suspense qu’elles engendrent et sans elles, ce roman perdrait de sa superbe.

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C’est sans grande surprise que ce roman est un réel succès, une fois de plus.fds-200x200-3618187
Que voulez-vous, il y a des auteurs comme ça qui débordent de talent mais ne sont malheureusement pas encore suffisamment reconnus comme ils le devraient.

Vindicta, c’est l’aboutissement de deux années de travail et le résultat est bluffant. Le suspense est maintenu jusqu’au bout du roman et il est quasi impossible de poser ce livre une fois que vous l’avez commencé. L’utilisation du gore est toujours faite de manière juste et réfléchie, et l’intrigue maintient le lecteur en haleine jusqu’au bout.
J’ai personnellement compris le twist aux ¾ du roman (foutu cerveau) mais cela ne m’a pas empêché de continuer à dévorer ce bouquin. Je voulais savoir si j’avais raison, je voulais savoir qui allait survivre ou non et j’ai adoré cette expérience de lecture. Et puis rien de tel que de pouvoir hurler à trois heures du matin « JE LE SAVAIS » devant un livre !

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Enfin, pour avoir eu la chance de rencontrer Cédric Sire à plusieurs reprises (si vous avez l’occasion, allez à sa rencontre, c’est une personne formidable !),  je sais que la transition du thriller fantastique au polar noir n’a pas été simple et lui a demandé beaucoup de travail, avec toujours cette question en suspens : est-ce que les fans de ses premiers romans arriveraient toujours à le suivre dans ce nouvel univers ?
Personnellement, je trouve que le pari est plus que réussi et que le fantastique n’a plus sa place dans ses romans actuels. Pourtant grande amatrice de surnaturel, je suis très satisfaite de ce nouveau tournant dans ses romans. Passer cette nouvelle étape lui a clairement permis de gagner en maturité et cela se ressent énormément dans son écriture, pour mon plus grand bonheur.
Je lui tire donc un grand coup de chapeau pour ce roman Vindicta et attendrait de nouveau avec impatience le prochain !

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