Shinobi Wat-AAH! : jeu de tatane chez les ninjas

Vous avez déjà pu le remarquer : j’aime les ninjas . Autant que l’alcool. Le fait que je sois bourré en écrivant ça devrait vous donner une valeur étalon. Et quand un jeu de société comme Shinobi Wat-AAH! me propose d’incarner un maître de clan, avec un gameplay bien aggressif et deux modes de jeu différents, il m’était impossible de résister. J’ai d’ailleurs été tellement enthousiaste que j’ai poussé le vice jusqu’à interviewer son créateur, c’est vous dire. Allez, on rentre dans le tas en défonçant la cloison en papier de riz. Wat-AAH !

De petit scarabée…

Commençons simplement, par le premier mode de jeu « petit scarabée ». Ici, vous aurez un certain nombre de cartes en main et devrez, chacun votre tour, poser une série de shinobis identiques pour former un clan. Si vous en posez deux, la plus petite forme du pouvoir du clan se déclenchera. Si vous en posez trois ou quatre, ce sera la version « deluxe » du pouvoir à laquelle vous aurez droit. Quand un joueur aura posé son quatrième clan, la partie s’arrête et on compte les points. Celui qui en a le plus a gagné. Simple, n’est-il pas ? Pas tant que ça…

Les 9 clans de shinobis. Ça a de la gueule hein ?

Shinobi Wat-AAH! comporte bien des subtilités ! La première d’entre elles étant que les clans de shinobis ayant les pouvoirs les plus puissants (le clan de l’araignée par exemple) rapportent le moins de points, tandis que les clans les plus rentables n’ont quant à eux que peu voire pas de pouvoirs (genre le clan de l’ours). Ainsi, il est très aisé de contrôler le jeu des adversaires en balançant des agents du clan de l’araignée ou de la carpe comme un bourrin… Mais aurez-vous le plus de points à la fin ? Pas certain.

Le jeu, bien qu’extrêmement aggro, comporte donc un petit volet tactique pas piqué des hannetons. En effet, il n’est pas rare de se retrouver tout près du but… et de se faire défoncer purement et simplement pendant les tours de vos adversaires. Shinobi Wat-AAH! comporte un syndrome « roi de la colline » (comprenez : celui qui est en tête prend généralement Bagdad) assez prononcé. Si vous avez un copain un peu soupe-au-lait ou mauvais joueur, je vous le dis d’emblée : laissez tomber. Shinobi Wat-AAH! est sans pitié, pour le bonheur des assoiffés de confrontation aggro… et le malheur des autres.

Bon évidemment, je pourrais vous parler des rônins et des yokaïs, d’autres cartes qui viennent enrichir ce déjà fort bien constitué jeu ! Mais je préfère d’ores et déjà passer à la suite, plutôt que de m’attarder sur des détails. Vous avez fini de vous latter entre petits scarabées ? Alors il est temps de passer au rang de GRAND MAÎTRE.

… à grand maître

Une fois les mécaniques du jeu bien assimilées, l’heure est venue de sortir le plateau de jeu (très joli) et d’envoyer vos ninjas enquêter pour vous. Car de simple jeu de cartes, Shinobi Wat-AAH! se mue dans ce mode en jeu de plateau.

A lire aussi  antoine bauza

Envoyez vos ninjas enquêter sur ce plateau

En mode « Grand Maître », un boss final vous attend ! Le problème, c’est qu’on ne sait pas qui il est au début de la partie. Et oui, il a été choisi au hasard ! Pour glaner des indices, il vous faudra envoyer vos disciples ninjas un peu partout sur le plateau. Mais comment gagner ces disciples, matérialisés par de petits shurikens en bois ? Pas dur… Il vous faudra vous fritter avec les autres, comme en mode « petit scarabée ».

Pour faire simple, le mode « grand maître » vous oblige à enchainer plusieurs parties « petit scarabée » pour gagner des « pions ninjas » à répartir sur le plateau. A vous de voir si vous préférez avec ceux-ci enquêter, glaner quelques bonus ou même envoyer quelques ninjas sur l’arène au centre du terrain pour l’affrontement final… en espérant en avoir mis le bon nombre par rapport aux adversaires. Et oui, foutre un max de « pions ninjas » sur l’arène ne suffira pas forcément pour gagner ! Certains boss sont plus vicieux que ça…

Ah, et pour les gens qui ont vraiment pris cheeeeeer et qui n’ont donc que peu de « points ninjas » à leur disposition, un petit tour au temple de la lune (très vite surnommé « le temple des losers ») les remettra sur les rails pour la baston d’après, grâce à une carte de pouvoir qui vous donnera un bel avantage !

Le Dark Shogun, l’un des boss du jeu. Regardez comme il a l’air méchant !

Le mode « grand maître » est donc un « petit scarabée » premium, pas dégueu du tout mais qui ne plaira pas forcément à ceux déçus par le mode de jeu de base. Je le trouve pour ma part plutôt intelligent : il permet de renouveler véritablement un jeu qui sans ça aurait vite tourné en rond.

Avant le verdict, une interview du créateur !

Petrocore : Bien le bonjour, Théo Rivière. Alors pour commencer, si tu nous parlais un peu de ton parcours ? Et surtout : comment en es-tu arrivé à devenir créateur de jeux de société ?

Théo : Salut ! En préambule, il faut savoir que créateur de jeux n’est pas mon métier à plein temps. Je travaille en parallèle pour une maison d’édition de jeux (Repos Production) pour qui je fais du développement.
En 2012, j’étais encore étudiant en littérature et j’étais testeur chez Libellud (la maison d’édition pictavienne qui a notamment publié Dixit). Tester les jeux des autres m’a fortement donné envie de me frotter à la création, étant joueur depuis pas mal de temps. Cet été là, je bossais dans une boutique de jeux-vidéo pendant les vacances scolaires et j’ai eu à un moment une énorme pause déjeuner (un truc genre 3h sans possibilité de rentrer chez moi). Pour m’occuper, j’ai commencé à bosser sur un prototype de jeu de cartes, violent et rapide.  La première mouture de Shinobi était née. J’ai présenté le projet à un copain illustrateur qui connait le milieu et il a bien aimé le jeu et m’a proposé de l’envoyer à un éditeur avec qui il travaille. Un peu inquiet à l’idée de présenter le jeu à quelqu’un que je connaissais pas, j’ai appelé Benoît Forget (qui avait bossé comme chef de projets chez Libellud) en qui j’avais pleinement confiance. Il m’a rassuré et demandé de lui envoyer un prototype aussi, il était en train de monter sa boite, Purple Brain. Long story short, le premier éditeur ne m’a jamais répondu et Benoît a été conquis  par le jeu et a décidé de l’éditer.
Cette expérience m’a clairement bien plu et j’ai ensuite réussi à la valoriser pour commencer à bosser dans le monde du jeu. 3 ans plus tard, me voilà à Bruxelles pour bosser pour Repos Production.

A lire aussi  Chroniques

Tu es le créateur de Sea of Clouds et du jeu qui nous intéresse aujourd’hui : Shinobi Wat-AAH! Je suppose que tu as pas mal d’autres projets sur le grill..?

La création est clairement addictive. J’ai 3 autres projets signés qui devraient voir le jour entre 2017 et 2018 et pleins de jeux à divers stades de finition. C’est dur de s’arrêter.
Mon prochain jeu à sortir s’appelle Sticky Chamelons, c’est un jeu d’adresse et de rapidité qui utilise des mains collantes (le gadget crétin des années 90). En ce moment, je bosse pas mal sur Flying Meeple que je co-crée avec Corentin Lebrat. C’est un jeu délirant où l’on doit catapulter des pions pour envahir une ville.

Étant un gros gros fan de ninjateries en tout genre, je ne peux que plussoyer ce choix de thème. Le Japon médiéval et tout le toutim, c’est un truc qui te passionne ? Ou tu pensais juste que les ninjas, ça collerait bien sur ce coup là et puis basta ?

J’ai grandi bercé par l’histoire et la culture japonaise. Mon père est prof de karaté et il m’a très vite branché sur toutes ces histoires de samouraïs et de ninjas. De son côté, ma mère est branchée cuisine asiatique et donc j’ai bien profité. Je suis également un grand fan de manga et Naruto est clairement une des œuvres qui a marqué mon adolescence. Le thème était présent dès le premier prototype et quand l’éditeur à décidé de le garder, j’étais ravi.

J’ai vu que tu avais collaboré avec Naïade, qui fait vraiment un boulot monstrueux. Comment vous avez bossé ensemble ?

Pour le coup, je n’ai pratiquement pas été en contact avec lui pendant qu’il bossait. La gestion de l’illustrateur, c’est vraiment le boulot de l’éditeur. On a pu se rencontrer depuis et passer pas mal de temps ensemble. En plus d’être bourré de talent, c’est vraiment un chic type. Là encore, quand Purple Brain m’a annoncé que Naïade serait l’illustrateur, j’étais aux anges.

A lire aussi  animation 2D

Sur un plan plus général, comment tu crées tes jeux ? Tu trouves d’abord le concept ? Le gameplay ? Ca dépend du sens du vent ?

Ça dépend clairement du sens du vent. Pour Shinobi et pour Sea of Clouds, je suis d’abord parti de la mécanique centrale du jeu, mais j’ai des projets en cours où je suis d’abord parti du thème. D’une manière générale, tout peut être une source d’inspiration, d’un autre jeu à un film en passant par un livre ou une sortie. La suite est moins facile. Après avoir eu l’idée, il faut réussir à se motiver pour créer le prototype et le tester. Pour moi qui suis un peu glandeur, c’est la partie la plus difficile.

Allez un gros classique : le mot de la fin. Dis ce que tu veux, t’es libre, laisse parler ton imagination pour conclure !

Merci à toi pour cet interview et merci à vous qui avez pris le temps de me lire. Prenez le temps de jouer et de découvrir de nouveaux jeux, la vie est plus belle quand on s’amuse.

10742718_10204115763826704_824066312_o-2771827

Shinobi Wat-AAH! est un jeu de cartes super agressif mais non dénué de tactique et de challenge pour les férus de compétition bourrine. Une fois le jeu de base épuisé, n’hésitez surtout pas à vous lancer dans le mode « grand maître » qui renouvelle carrément l’expérience en donnant au jeu une toute nouvelle dimension, faite d’enquête, de suspens… et de coups de putes (sinon c’est pas drôle).

Ah et évidemment, mention spéciale au boulot de Naïade, qui ne cesse décidément pas de nous ébahir par la qualité de ses productions.

Vous aimerez aussi

  • Far West

    20 février 202020 février 2020 LazyLumps Au commencement de cette nouvelle décimale, le froid mordant s’est insinué entre mes vêtements et m’a fait autant greloter qu’un Pétrocore en manque de skavens de Total War : Warhammer 2. Frigorifié, je me suis donc retourné vers mes premiers amours en quête de chaleur désertique, de sueurs acre,…

  • assassinat

    4 décembre 20167 février 2017 LazyLumps Il se faufile dans les ruelles, empoisonne la tasse à mémé Jackie, et exécute le petit chat d’un coup de Read More 2 décembre 20163 février 2021 LazyLumps Pour cette semaine Assassin, nous avons longtemps débattu sur le cœur de notre sujet, l’essence même du thème. L’assassin, ou Read…

  • humour

    19 mars 202019 mars 2020 KaMelaMela Fleabag, la meuf la plus cynique/déjantée/drôle d’Angleterre par Kamelamela, c’est par là ! Read More 12 mars 20202 avril 2020 Roufi La musique adoucit les mœurs, mais elle peut aussi faire gonfler les pecs, reluire une armure, ou exercer les zygomatiques. Si vous n’avez pas peur des riffs qui…

  • Ninja

    23 janvier 201822 mars 2018 Narfi « Mais il est teubé ce Narfi là, à nous parler des influences du Japon sur Zelda ? C’est développé au Japon, Read More 7 février 20179 septembre 2019 Petrocore Les aficionados du Cri du Troll le savent : j’ai un alter-ego maître-ninja nommé Maître Jean-Jacques. Shinobi et vidéaste à Read…

  • New York

    « La croisée des chemins », voilà une expression qui décrivait plutôt bien mon sentiment quant aux derniers travaux de Rowling. C’est Read More 29 septembre 201629 septembre 2016 KaMelaMela Sorti en 2002, La 25 eme heure est un film de Spike Lee, réalisateur entre autres de Malcom X, He Read More A lire aussi  hybrides

  • requin

    Ta da… Ta da… Tada tada tada tada ! Nemarth ne se déplace plus qu’avec la musique des Dents de la Mer en fond sonore sur son portable, et c’est la faute à Maneater, un jeu où vous incarnez un requin en quête de chair fraîche. Et dans cet article, il va vous expliquer pourquoi…