Dragon 2, c’est compliqué de faire une bonne suite

 Parmi la multitude de films d’animations qui sortent périodiquement dans les salles obscures et dont on nous vante les mérites en termes plus ou moins laudatifs, il faut bien reconnaître que les perles ineffables ne sont pas la norme, plus encore dans le cas des suites, qui, davantage stimulées par l’appât du gain que par la moindre motivation artistique, sont souvent de désespérants débarras sans âme, pleins de pesanteurs et de clins d’œil aussi racoleurs que ceux d’une fille de joie d’un bordel du Paris des Années Folles.

Mais chers lecteurs, vous me direz, où donc vas-tu avec cette interminable phrase ? Précisément dans la crainte viscérale que j’ai ressenti en apprenant que les protagonistes de l’excellent Dragon reprenaient du service. Je suis plutôt un garçon pessimiste et je plaçais peu d’espoir dans cette nouvelle œuvre, mais puisque les autres films projetés au cinéma alors me tentaient autant qu’une baignade à Dunkerque en plein mois de novembre, je me résolus à le voir tout de même.

Mais tout d’abord rappelons brièvement ce qu’est le concept de Dragon.

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J’entends déjà les cancres du fond de la classe en train de ricaner « Hé ben c’est des gros lézards volants qui crachent du feu ». Taisez-vous donc, ignares que vous êtes ! Bien sûr que l’on va voir des bestioles ignifugées papillonner gaiement dans ces films, l’évidence, néanmoins c’est bien plus que cela, déjà parce que certaines de ces grosses bébêtes cassent un peu les codes du comportement du dragon classique (le dragon de base avec tout l’attirail contemporain), à commencer par Krokmou lui-même. Mais Dragon c’est aussi des Vikings, oui les squatters de radiateurs du fond, des Vikings et des Dragons !

Je crois qu’on l’on comprend de fait la pertinence définitive d’un tel concept !

 

Cessons tout de même d’empiler les évidences, Dragon c’est également une très belle histoire d’un gamin qui essaie d’exister dans son identité de petit viking à coté d’un papa imposant, buté comme une rangée de patates (métaphore potagère) et d’aller contre l’opinion commune, qui est, comme souvent, d’une sublime profondeur (tu la sens l’ironie?!) Je ne veux pas trop saboter le visionnage de ceux qui n’ont pas encore découvert ce film. Alors les deux zigs du fond on lève ses miches et on court regarder ce petit bijou d’animation et on revient ensuite dare-dare pour se faire une idée sur le numéro deux !

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Vous voilà revenus, je reprends. Vint la séance, les lunettes pour la 3D vissées sur le museau (avec celles pour la vue c’est tout une logistique), le calepin sur les genoux, j’attendais fébrilement le début du film, une crainte animale de me retrouver devant un nouveau Monster House m’étreignant le cœur. Vous savez ce genre de films d’animation pas du tout fait pour les grands enfants mais qui amusent follement les petits… Ce fut un long moment de solitude dans le cinéma avec ma moitié, de voir entrer des cohortes de microbes, conduits par des parents vaguement résignés ; on s’est rapidement dit qu’on avait peut être fait une connerie et la suite nous a donné raison… Pour Dragon 2 néanmoins la première approche avait été plus positive avec une moyenne d’âge plus… confortable dirons-nous. Restait l’épreuve du feu. Arrimé à mon fauteuil je guettai donc les premiers échanges verbaux. C’est toujours par là que les œuvres trébuchent. Or justement, Dragon 2 a eu une démarche plutôt claudicante, roulant de la verve bien ficelée à la plus dégoulinante tranche de guimauve.

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Les dialogues…

C’est la première chose que j’ai griffonné en tiquant dans mon calepin, et c’est sans doute aussi ce qui m’a le plus dérangé. Le premier Dragon ne m’avait pas laissé cette impression et je me demande vraiment si avec ce deuxième volet, paradoxalement puisque les héros sont plus âgés, ils n’ont pas cherché chez DreamWorks à élargir leur cible vers un public plus jeune. C’est un poil paradoxal puisque le premier avait l’intelligence d’avoir suffisamment de niveaux de lecture pour permettre à tous d’y trouver son compte. C’est un peu la recette de Pixar, l’illustre concurrent ; on peut à loisir s’esbaudir devant les touchantes expressions du petit robot Wall-e mais aussi comprendre la puissance du message philosophique lancé à une humanité qui s’avilit elle-même, se déresponsabilise jusqu’à finir vautrée dans un fauteuil, confite comme un canard du Sud-Ouest dans sa graisse et avec les capacités intellectuelles d’un tourteau attardé mental. Et justement vient par ce biais l’autre problème, celui du message général à dégager du film.

Quelque chose m’a pas mal gêné à propos de Harold et de sa « destiné ». On l’a vu dans le premier, il est le fils du chef du village, il se prépare donc à assumer cette fonction après son père. Dès le début du numéro deux, ce thème est annoncé, et on s’attend donc à un cheminement intérieur l’amenant, ou non, à se couler dans le moule préparé pour lui. Au vu du déroulement du premier tout portait à croire que le jeune héros choisirait de transgresser cette voie et de briller une nouvelle fois par son iconoclasme. Et malheureusement l’inverse se produit. C’est un peu désespérant de glisser dans cette forme de conformisme quand on a construit un personnage dans un sens inverse. Il y avait moyen de faire échoir la fonction à d’autres, comme sa chérie, Astrid, qui est nettement plus en phase avec ce genre de réalités.

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Astrid… ah les charmes d’une hache !

Mais comme c’est un thème très commun dans les dessins animés et plus largement dans les contes, c’est finalement assez naturel de voir le jeune prince rentrer dans le rang et faire ce pourquoi il est prédestiné. Là on perçoit mieux le décalage dont je parlais plus haut à propos du public. Il est clair à mon sens qu’il n’y a pas eu d’interrogation profonde sur le thème. Lors de la réalisation ils se sont contentés chez DreamWorks de se couler dans une trame narrative classique et enfantine. C’est un parti-pris mais quand on a aiguisé les appétits des grands enfants, adeptes de messages subliminaux et plus profonds, on prend le risque de les froisser un petit peu. Pour moi le plus dur a tout de même été de voir un village entier, peuplé de féroces guerriers vikings, de sacrées nanas comme celle d’Harold, être totalement démunis face au péril et s’en remettre totalement, comme au messie, à leur jeune prince héritier, plus par son ascendance que par ses actes. Tout ce qui est censé justifier son évolution intérieure reste assez mou et jamais suffisamment puissant pour justifier un tel revirement.

Nous retrouvons maintenant nos lecteurs décrochés en route. Oui, ouh ouh !!! Vous pouvez revenir ! Bien, poursuivons. J’en arrive à un dernier élément un poil négatif et qui est dans le continuité de ce que j’énonçais précédemment. J’ai trouvé les personnages un peu trop stoïques (un comble) et manquant de d’exubérance dans l’expression de leurs sentiments. Souvent une expressivité forte permet de passer outre un dialogue un peu creux et c’est une carte que j’aurais aimé voir davantage jouée. Mais c’est aller un peu fort sur cette question ; le film est en effet assez subtil et touchant ce qui contraste avec la balourdise de bien des productions. On se prend ainsi parfois à s’immerger totalement dans l’Histoire, dans l’univers qui défile sous nos yeux, et malgré une trame narrative très simple, on suit avec intérêt les démêlés des héros avec la menace, forcément terrible, qui pèse sur leur monde. Quelques personnages sont un peu sous exploités dans ce second opus, en comparaison avec le premier et ils sont un peu trop relégués dans la catégorie des comiques-troupiers. Encore une fois c’est un peu pinailler parce qu’ils sont vraiment très marrants et avec Krokmou assurent avec aisance une drôlerie très présente et qui touche juste. Une scène de sauvetage de donzelle m’a littéralement fait éclater de rire ; on est loin des blagues téléphonées de certaines productions intitulées « comiques ». Ce langage du rire, présent en filigrane et qui n’est jamais une fin en soi (ce qui n’est pas forcément négatif, n’est-ce pas les deux du fond, c’est juste un autre registre que celui qui nous occupe) montre assez bien que l’œuvre n’est pas tombé, malgré tout ce que j’en ai dit, dans l’unilatéralité.

Ces différentes types de langages cinématographiques sont d’ailleurs très clairement mis en exergue à l’écran par les décors. Les environnements de la lumière et de la couleur restent ceux de la joie, du bonheur, des âneries, alors qu’à l’inverse tout ce qui concerne la faction des méchants possède une esthétique sombre, hérissé de métal et de pieux.

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Le méchant rasta

C’est un contraste aussi saisissant que celui que l’on peut voir dans des œuvres épiques bien connues de la culture populaire comme Star Wars ou le Seigneur des Anneaux. Les décors sont en tout cas assez proche en ce qui concerne l’atmosphère à ce que l’on rencontre dans l’univers dépeint par Peter Jackson, adapté à un film d’animation. De toute façon visuellement c’est magnifique ; les décors sont nombreux et variés et nous invitent à passer d’un Mordor d’animation à la planète d’Avatar sans que la cohérence d’ensemble n’en soit affectée. Une des scènes les plus intéressantes se déroule dans l’obscurité d’une caverne remplie de dragons ; leurs gueules luisantes d’un feu farouche procure la seule lumière de la scène et permet à merveille de présenter le nouveau et mystérieux protagoniste qui intervient dès ce moment. Les grands espaces ne sont pas en restes et la 3D, très utile au visionnage accentue encore l’immersion. Cela en devient vraiment jouissif dans les scènes de combat dans lesquels on perçoit sans mal la pesanteur et l’immensité de certains dragons. L’animation, pour couronner le tout, est bien rythmée, souvent excellemment composée. On en prend plein les mirettes et le temps passe finalement assez vite, malgré la pesanteur de bien des échanges verbaux. 

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On l’aura compris, beaucoup de choses ont été ici misées sur le visuel ; rythme, dynamique, esthétique sont de vrais maîtres mots de cette œuvre. DreamWorks signe donc de ce point de vue une copie d’un très bon niveau et obéit à une certaine inclination actuelle du cinéma qui a tendance à soigner davantage la forme que le fond. L’image est un élément fondamental du 7ème Art, évidemment, mais ce n’en est pas le seul. A trop concentrer l’attention sur ces considérations on en vient à négliger les autres. Dans Dragon 2 le préjudice n’est pas inexpiable et le tout reste de bonne facture. Mais il est à espérer que cette déformation du matériau de base ne s’accentue pas à l’avenir, dans une encore chimérique suite, ou dans d’autres œuvres du studio. En somme Dragon 2 c’est vraiment pas mal du tout mais par plusieurs aspects que je trouve très gênants, cela n’entre pas dans la classe au-dessus, celle de certains films d’animation qui ne font pas que nous éblouir mais qui nous remuent profondément.

 

 

 

 

Flavius

Le troll Flavius est une espèce étrange et mystérieuse, vivant entre le calembour de comptoir et la littérature classique. C'est un esthète qui mange ses crottes de nez, c'est une âme sensible qui aime péter sous les draps. D'aucuns le disent bipolaire, lui il préfère roter bruyamment en se délectant d'un grand cru et se gratter les parties charnues de l'anatomie en réfléchissant au message métaphysique d'un tableau de Caravage.

Lâche ton cri

  • 28 décembre 2014 at 12 h 43 min
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    Ce que j’aime beaucoup dans le commentaire très bien argumenté de NoOdle, c’est qu’il est complémentaire avec l’article plutôt qu’en contradiction. J’ai l’impression d’avoir un très bon article sur ce qui ne va pas dans le film, complété par un très bon article sur ce qui fonctionne ;)
    Parce qu’en effet, dans la narration il y a tout ça (les logiques expliquées par Flavius et celles expliquées par NoOdle).
    Mais justement je suis d’accord avec Flavius sur sa critique, notamment de l’évolution d’Harold. Certes elle montre un enjeu enfantin de « se comparer au père, avoir peur de le décevoir mais ne pas vouloir être comme lui tout en trouvant quand même sa place » (ce que dit NoOdle) mais cet enjeu est résolu à la Roi Lion en disant : « ok c’est bon, t’as fait ta rébellion, maintenant tu reprends ta place dans la société en faisant comme papa ». Clairement, sur le rôle d’Astrid, à aucun moment n’est souligné le fait qu’elle pourrait être la véritable chef (alors que le début montre qu’elle le pourrait). Elle devient d’ailleurs inutile très tôt dans le film. S’ils avaient voulu montrer que c’est elle le vrai chef et bien… il fallait le montrer.
    A mon sens, le plus grave, Flavius en parle moins dans l’article que moi j’en aurais parlé, c’est la démonstration sur les types de « gouvernement ». A ce niveau, le film est pour moi un cas d’école de démonstration forcée et bancale. Parce qu’il oppose un gouvernement fondé sur la terreur et la force (les méchants) et un gouvernement fondé sur la légitimité (Harold et Crokmou à la fin). Or le film pose qu’il faut un alpha mais un alpha gentil auquel on peut obéir parce qu’il est juste et légitime : Crokmou à la fin, devant lequel les dragons vont jusqu’à s’agenouiller parce qu’il a « battu » l’alpha méchant. Sauf que le 1 avait posé que les dragons de Berk n’avait PAS BESOIN d’alpha. Pourquoi subitement imposer que si, en fait, il en faut un, alors que ça se passait très bien ! C’est résoudre un problème qui n’existait pas, juste pour forcer une morale (qui est moins belle à mon avis).
    Qu’un film veuille dire qu’il nous faut un chef gentil et légitime, soit, j’aime pas trop, mais soit. Par contre, qu’il n’aille pas le faire alors qu’il nous avait démontré que ce n’était pas le cas et que ça fonctionnait.
    Je précise quand même que j’ai adoré beaucoup de choses dans le film, notamment visuellement (la maman est beaucoup plus réussie à ce niveau – même s’ils pissent allégrement sur ce qu’ils avaient établi d’elle dans le 1 – que dans son rôle) ou sur des choix géniaux comme le personnage du chasseur sur lequel fantasme la blonde à tresse.

  • 27 décembre 2014 at 13 h 19 min
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    Merci pour cette longue réponse bien argumenté! Je souhaite d’abord évoquer une chose ; une critique, aussi fournie soit-elle, restera toujours subjective et la transcription des sentiments de l’auteur à un moment donné, nous laissant à voir son expérience personnelle, ses craintes, ses goûts, sa culture… C’est ce qui fait qu’il n’y aura jamais (j’ose espérer) d’unanimité face à la création et de choses aussi absurdes que la définition ultime du « beau » telle que certains ont tenté de l’imposer au gré de l’Histoire. De ce fait votre point de vue a autant de valeur que le mien ; il incline à d’autres sensibilités.

    Maintenant je vais définir un peu plus mon propos. Concernant cette fameuse « guimauve » qui vous a quelque peu chiffonné. Attention, je ne crois pas avoir dit que la scène de retrouvaille en était remplie, je la trouve au contraire bien fichue et éloignée des poncif nian nian du genre, non, la guimauve est pour moi concentré dans des dialogues faciles, dispensable et sans doute mal écrits, trop attachés à la communication aux enfants et manquant justement de cette subtilité que vous remarquez ; la capacité à s’adresser à tous. Pour moi c’est clairement un manque par rapport au premier qui ne se laissait pas autant aller à ce défaut. Personnellement c’est un élément important ; je fonctionne beaucoup à la sonorité et un dialogue bancal, creux ou facile m’exaspère très rapidement.

    Ensuite pour ce qui est de la destiné du héros, de la façon de gérer le pouvoir chez les Vikings, je remarque que vous vous en remettez beaucoup à votre lecture, qui n’est pas la mienne. A mon sens, dans le premier, Harold est clairement en rupture, à raison, avec sa société, son éducation… Il cherche a trouver sa voie et à affirmer sa personnalité singulière. On est encore en plein dans ce registre dans le début du deuxième, avec un Harold parti on ne sait où, à la découverte du monde, plein d’inconscience et de liberté. Or le film s’échine à une chose ; lui faire accepter un destin pour lequel on n’a cessé de nous dire qu’il n’était pas fait. Vous avez raison de porter votre attention sur ce point sur Astrid et je regrette que l’équipe de réalisation ne l’ait pas fait davantage! Astrid est plus qu’au second plan, elle ne pointe que très rarement le bout de son nez et c’est fort regrettable parce que si Harold devait assumer pour la forme sa fonction de chef pourquoi ne pas avoir mis l’accent sur sa moitié dans cette dimension de commandement? A mon sens c’est pour des raisons très conservatrices qu’ils ont composé cet opus de cette manière. Après les outrances de la jeunesse on siffle la fin de la récré et Harold rentre dans le rang, il se trouve un travail bien rémunéré et enterre ses passions et ses besoins d’évasion. On a la même chose dans Le roi lion et je crois sincèrement que c’est un avatar d’une pensée nettement moins ouverte que la vôtre qui a rattrapé Dragon II.

    De même avec notre Krokmou bombardé chef des dragons ; c’est vous qui estimez « Nan allez, déconnez pas, on retourne jouer ??? ». C’est parce que le petit dragon noir est sympa mais en politique ce qui compte ce n’est pas que les personnalités mais ce que les précédents permettent ; imaginez que Krokmou ait un gosse qui soit un vrai saloupio et bien il pourra réclamer l’héritage paternel pour « recouvrir le monde de secondes ténèbres »! Et ça franchement ça me ferait mal, surtout quand on a vu combien le monde des dragons pouvait être sympathique retranché de toutes ces questions de pouvoir, de sujétion… Le paternalisme bienveillant du premier alpha n’est même pas vraiment une bonne solution parce qu’il y a toujours le risque du contrôle « déshumanisant » et le film s’attache à nous le prouver. Alors pourquoi justifier après ce retour à des valeurs inverses? Moi j’y perds mon latin.

    En tout cas merci de votre retour et de votre argumentaire ; cela enrichi les points de vue et par là même notre site!

  • 22 décembre 2014 at 15 h 36 min
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    Je reviens donc vous raconter pourquoi je ne suis pas d’accord avec cet article dont certains points m’ont même vaguement hérissé le poil. (Je ne vous permets aucun commentaire sur mes poils.)

    J’annonce la couleur : SPOILERS à foison, je vais citer des scènes précises, sans prendre de pincettes, avis aux intéressés qui ne l’ont pas vu et n’aimeraient pas se gâcher la surprise.

    Revenons à nos brebis. Justement. A toutes nos brebis, parce qu’à mon sens, Dragon 2 se donne à lire à tous, des plus petits aux plus grands :
    6-7 ans « Maitresse, j’ai eu très peur quand il (l’alpha méchant) a fait les yeux sur Krokmou j’ai cru qu’il allait mourir. » Déjà, ces gamins tout petiots sentent que cette domination brutale, esclavagiste peut entraîner la mort.
    9-10 ans « Maitresse, y’a Tessa qui pleure ! » « Oui, moi aussi… » Et là on touche un des messages qui ont chopé tous ces gamins en plein dans le cœur : Réunir les parents. Voir que rien ne peut les séparer fondamentalement puisqu’ils s’aiment toujours malgré les années de séparation. Je ne sais pas si c’est assez visible socialement parlant, mais ce rêve de voir ses parents réunis, c’est celui de 80% des gamins.

    On a ensuite la perte brutale (parce qu’elle l’est forcément) d’un de ses parents qui parle là à tout le monde, peu importe l’âge, parce que soit on l’a vécu, soit on est en train de le vivre (oui j’ai des élèves dont un parent a un cancer, mal avancé), soit c’est viscéral une peur ancrée en nous, dès la naissance. Et c’est justement parce qu’elle est brutale (les parents viennent juste de se retrouver, tu te dis olé, le happy ending à l’américaine ET BIM !) qu’elle n’est pas dégoulinante de guimauve.

    Après on a tous les messages aux grands ados, remplis d’humour, avec la jumelle et le chasseur, ces codes que nos collégiens connaissent par cœur même si nous autres parents refusons de l’admettre (« Prends mouaaaaa !! »), celui également de « j’aimerai bien continuer de jouer avec mes dragons, mais quand même je vois bien que je pourrais faire d’autres choses », etc.

    Et enfin, à nous les grands, parce qu’on se rend compte aussi en devenant parents ou adultes responsables (?), qu’on voudrait faire aussi bien que nos parents, mais que fondamentalement on veut pas faire pareil. Ce qui est quand même la problématique majeure d’Harold (« J’ai peur de devenir mon père »). Ou du moins celle de rendre ses parents fiers, parce qu’on peut avoir les parents les plus pourris du monde, bé ça reste nos parents et on a envie de leur faire plaisir. On se dit aussi « Est-ce que mes choix, mes valeurs protègent mes enfants ou est-ce que mes décisions peuvent les mettre en danger ? », ce qui est la raison de la disparition de la maman. Et ça, ça me parle directement.

    Il y a aussi autre chose qui m’a beaucoup touché, quand le père d’Harold est mort, que le bateau s’éloigne et que cet adulte en devenir se retrouve complètement paumé (il ne veut toujours pas être son père, ne sait plus si ce qu’il avait commencé à trouver c’était bien, ni par où aller maintenant), sa mère lui redonne la clé, que chaque parent a pour aider ses enfants à se construire : l’histoire de sa naissance. Ça c’est fondamental, on a toujours envie de savoir une chose à propos de ce jour, parce que dans l’histoire de la famille il y a toujours quelque chose de fort, de remarquable, qui nous aide à nous construire. Et ça, ce moment là dans Dragon 2 c’est un moment clé qui a été droit dans mon cœur de jeune maman.

    Ensuite, je ne suis pas d’accord sur le fait que Harold est installé comme chef, « point final ». Il est certes officiellement le chef, mais le film nous construit bien le personnage d’Astrid comme une femme de chef qui gèrerait RÉELLEMENT le village puisqu’elle en a totalement les capacités. D’autant que cette société de viking, telle qu’elle nous l’est présentée, ne nous dit pas que ce sont toujours les hommes qui commandent, j’en veux la preuve qu’au moment de l’attaque de Drago sur la forteresse de glace, la mère d’Harold commence à s’agacer, Stoïque l’arrête et lui dit (grosso modo) « nous sommes une équipe, qu’est-ce que tu veux faire ? ». Et c’est elle qui prend la décision de la suite, à savoir protéger les dragons.

    Donc je ne vois pas le conformisme là dedans, Harold continue de combattre la guerre, refuse un affrontement et défend jusqu’au bout (il dit clairement à Drago, quand tout est perdu pour ce méchant rasta, « on arrête là » et Drago le refuse) ses valeurs de paix. D’ailleurs, mis à part le duel entre Krokmou et l’alpha marin, il n’y a aucune volonté de tuer l’ennemi de la part de nos vikings préférés, ils veulent juste qu’on leur foute la paix, protéger leurs dragons et continuer les courses au mouton noir. Et même ce duel n’est pas dans le but de tuer, mais de repousser l’alpha (on imagine très bien que si Krokmou avait voulu le décapiter, il aurai pu, vu le rayon laser de malade qu’il se trimballe dans le ventre !)

    Et si le jeune prince entre dans les rangs, à mon sens, c’est très important comme message à faire passer : même si tu te sens paumé, t’arriveras quand même à trouver ta place. Et là Harold il a SA place. Il a réussi à réunir dragons et vikings, à libérer les dragons d’un mode de soumission à l’alpha (j’y reviens plus tard), et malgré son rôle de chef continue la course au mouton noir. Il ne prend pas la place de son père, il prend la sienne. Et comme message, je trouve ça plutôt bien.

    Je finis sur deux choses : le méchant, qui ne m’a pas du tout plu. Déjà parce que j’aime pas les méchants, et surtout parce que je vois pas ce qu’un rasta vient faire là. Ca fait UN PEU le méchant noir contre tous les gentils blancs. Et puis on est dans le monde des vikings. Qu’est-ce que ce type vient faire là ?! Je le trouve pas crédible. J’aurai plus vu un Russe venir les faire chier mais politiquement parlant actuellement ils n’ont peut-être pas osé/pu/eu les schtroumpfs de le faire.

    Dernière chose, la victoire de Krokmou sur l’alpha à mon sens, permet aux dragons de se libérer du système des alphas, puisqu’à la fin, tous les dragons s’inclinent et Krokmou est très fier de lui. Puis pousse un cri que j’interprète comme étant « Nan allez, déconnez pas, on retourne jouer ??? » En effet, les autres dragons lui répondent le même. Ce qu’ils ne faisaient pas avant : quand les alphas poussait leur gueulante, c’était esclavage et compagnie.

    Voilà. Je ne me souvenais que de très peu de choses du premier Dragon. Celui-là m’aura plus marqué je pense. Mais le plus kiffant du kiffant, reste la première apparition de la mère dans son costume de combat. Quelle scène magnifique, mystique, que tu sais pas si t’es trop en extase ou trop flippé. Et ça c’est LOIN, très LOIN de la guimauve.

  • 21 décembre 2014 at 23 h 04 min
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    J’ai juste une question : Mais qui va au cinéma avec un calepin ???!!!!!

    Je ferai un commentaire plus détaillé plus tard pour expliquer pourquoi je suis pas d’accord.

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