La rentrée de Am’s: Démons et magie en Mâconnais, The Good Place et L’Appel de Cthulhu illustré
Pour ce premier article de 2019, c’est à mon tour de vous présenter mes trois derniers coups de cœur. Découverts purement par hasard ou offert par le Troll de Noël, j’ai sélectionné pour vous de vrais bijoux qui méritent vraiment que l’on fasse parler d’eux. Laissez-vous emporter par les Démons et la magie au 17éme siècle, l’humour décalé de la série The Good Place et plongez dans l’horreur avec L’Appel de Cthulhu illustré.
[Livre] Démons et magie en Mâconnais
Commençons par ma découverte la plus inattendue de la fin d’année 2018 : l’auteur José Raymond que j’ai eu la chance de rencontrer par hasard lors d’une de ses séances de dédicace alors que je n’avais malheureusement pour moi aucune idée de qui était ce monsieur assis sagement derrière sa table. Bref, après discussion, je suis finalement repartie avec un roman et un tout petit livre de 84 pages seulement nommé « Démons et magie en Mâconnais ».
Ce bouquin n’est pas un roman puisque José Raymond a décidé de le publier suite à la conférence du même nom qu’il avait donné en 2016, pour permettre à celles et ceux qui n’avaient pas eu la chance d’y assister de bénéficier de ses recherches dans les archives de la ville de Macon.
Nous voici donc plongé au cœur du 17éme siècle pour suivre trois dossiers qui relatent des faits réels de manifestation démoniaque, de possession par le diable et d’exploits d’un sorcier. Alors quand je dis réels, il faut bien entendu se replacer dans le contexte de l’époque. Mais il faut tout de même noter que les peurs et croyances étaient tellement ancrées à cette époque que ces récits ont aisément trouvé leur place dans les archives de Macon !
Ce livre est tout simplement un petit bijou qui relate de manière claire et précise ces trois histoires sans pour autant s’embarquer dans des discours rocambolesques. José Raymond trouve toujours une note d’humour ou une pointe d’ironie à rajouter dans ses descriptions, ce qui rend la lecture extrêmement légère. En effet, il est toujours sympa d’avoir le commentaire d’un auteur du 21éme siècle sur le cas d’une prétendue possession démoniaque ayant eu lieu au 17éme siècle !
Ces dossiers comprennent également des illustrations elles aussi sorties des archives qui apportent des éléments de compréhension supplémentaires et démontrent un peu au fond, toute l’ampleur de la folie de l’époque concernant cette immense peur du diable et de l’inconnu.
José Raymond n’expose pas seulement les faits historiques et puis « débrouilles toi avec ça », il ajoute des propositions d’explications rationnelles qui sont possibles grâce à nos connaissances actuelles sans pour autant nous les imposer. Ainsi, libre à vous de croire si vous le souhaitez, que l’une des femmes était réellement possédée et non pas atteinte d’une maladie rare et bien entendu incurable au 17éme siècle.
L’auteur nous fait pleinement bénéficier de ses recherches et offre à la fin de son livre la lettre d’époque complète, non traduite en français actuel, d’un des trois hommes abordés dans ces dossiers, qui décrit avec horreur et incompréhension la possession démoniaque subit par sa pauvre femme. Au cas où vous ne vous sentiez pas suffisamment immergé en plein cœur du 17éme siècle, là pour le coup, vous y plongez la tête la première et c’est juste parfait !
Je ne pourrai donc que vous conseiller de mettre le nez dans ce livre qui ne vous prendra pas beaucoup de temps mais saura parfaitement ravir les passionnés d’histoires étranges. Si vous êtes toujours à la recherche de « vraies histoires » de sorcellerie et de démons, n’attendez plus et courez chez votre libraire !
[Série] The Good Place
The Good Place, c’est la série Netflix créée en 2016 par Mike Schur sur laquelle je n’aurai vraiment pas misé. J’avais vu à deux reprises la bande annonce défiler en me disant « mouais non, l’humour a l’air trop bof ». Et puis finalement, je me suis laissée tenter, plus par le format court (13 épisodes d’une vingtaine de minutes chacun) parce que non, on a pas toujours le temps de regarder des épisodes de 45 minutes, que par l’histoire en elle-même. Et ce fut, au final, une excellente surprise !
Le scénario de base est simple : Eleanor Shellstrop jouée par Kristen Bell (#veronicamarsforever) vient de mourir fauchée par un véhicule et se retrouve dans The Good Place, une sorte de Paradis (Traduit en français par le « Bon Endroit » mais je trouve ça moche).
Michael, l’architecte joué par l’excellent Ted Danson, qui a créé cet endroit de toute pièce explique à Eleanor son fonctionnement. À priori, seule l’élite de l’humanité a la chance d’y être envoyée après son décès. En gros, il suffit d’avoir voué sa vie aux autres, enchaîné les bonnes actions humaines et environnementales et surtout n’avoir jamais effectué quoi que ce soit de compromettant durant toute son existence pour pouvoir y accéder. Autant vous dire que c’est chose quasi impossible.
Alors félicitations Eleanor pour cet exploit ! Seulement voilà, il y a eu une grosse erreur sur la personne. Tout ce qui l’intéressait de son vivant était de vivre sa vie comme elle l’entendait, de se montrer détestable envers les autres et de picoler. En voilà une belle bourde qui risque de faire tâche…
Le premier épisode annonce directement la couleur. Littéralement. Une effusion de couleurs toutes plus flashy les unes que les autres. Je me suis même demandée si lors du brainstorming décors, ils n’avaient pas ouvert le concours de celui ou celle qui trouvera l’idée la plus kitsch. Donc oui, j’avoue, au début j’avais un peu mal aux yeux. Mais finalement et contre toute attente, on s’y fait assez vite parce que ce décor colle à merveille avec le ton décalé de la série. D’ailleurs, il m’a fallu environ 3 ou 4 épisodes pour vraiment me laisser prendre au jeu et me faire à cette histoire plus que décalée. Mais une fois le scénario débloqué, je n’arrivais plus à m’arrêter !
C’est donc dans cette ambiance que nous allons suivre Eleanor Shellstrop qui va désespérément tenter de devenir une meilleure personne afin de conserver sa place dans cet endroit de rêve, le tout sans se faire démasquer. Elle sera épaulée par Chidi, son âme sœur commis d’office et philosophe, sa voisine Tahani, la femme plus-que-parfaite et son âme sœur Jianyu le moine muet, sans oublier Janet, l’intelligence artificielle de cet endroit qui m’a fait hurler de rire plus d’une fois.
La série nous présente donc des personnages hétéroclites hauts en couleur tantôt horripilants, tantôt attachants mais surtout hilarants ! Quoi qu’il en soit, ils ne vous laisseront pas indifférents et j’espère qu’ils seront pour vous comme ils l’ont été pour moi : la cause de nombreux fous-rires en solo sur votre canapé. Pour ce faire, l’histoire met en scène une multitude de situations improbables qui ne manqueront pas de vous surprendre à chaque épisode.
Cet humour léger sera idéal pour oublier vos soucis du quotidien et vous détendre tranquillement après votre journée de travail (surtout si elle a été bien pourrie !).
De plus, le scénario qui semble déconstruit de prime abord dévoilera tout son sens au fur et à mesure de l’histoire et vous fera trépigner d’impatience à chaque fin d’épisode. C’est finalement vers la fin de la première saison qu’un twist des plus inattendus vous explosera en pleine figure et lancera cette série dans une toute nouvelle dimension, pour notre plus grand bonheur. Attention, situations loufoques en route !
[Livre] L’Appel de Cthulhu illustré
Finissons en beauté avec un grand classique : L’Appel de Cthulhu. Un classique oui, mais illustré s’il vous plaît ! Il est inutile de vous préciser qu’une nouvelle de H.P. Lovecraft illustrée et bien… ça ne court pas les rues. C’est ainsi que l’éditeur Bragelonne nous propose une version de cette nouvelle illustrée par Baranger dans un grand format trop chouette (27 x 36 cm) qui m’a donné l’impression d’être une petite fille avec un graaaaand livre entre les mains.
Malgré son absence d’illustration (et pourtant il y a vraiment matière à travailler), L’Appel de Cthulhu est l’un des textes fondateurs du roman d’horreur fantastique et c’est tout simplement le début d’un mythe autour duquel découlera une belle série de textes.
La créature Cthulhu reste encore aujourd’hui la plus célèbre pour celles et ceux qui s’intéressent un minimum à l’univers fantastique, que ce soit dans le domaine littéraire ou celui des jeux de rôle (domaine qui a grandement contribué à développer la célébrité de Cthulhu).
Bon, pour les personnes recluses qui ne connaitraient pas le fameux mythe de cette charmante créature, L’Appel de Cthulhu est une nouvelle assez courte qui relate de manière non linéaire la découverte d’une sorte de culte satanique célébrant une figure de l’Ancien Monde nommée Cthulhu.
Le narrateur exhume les articles de presse et les documents assemblés par son oncle défunt à propos de ce culte, ce qui donne au récit une allure quasi documentaire. Cette écriture déstructurée permet de faire monter crescendo l’horreur et l’angoisse chez le lecteur : plus le narrateur obtient de nouvelles informations, plus les scènes deviennent horribles, irracontables, indescriptibles, jusqu’à atteindre son summum avec l’apparition de Cthulhu.
Et c’est là que les illustrations sublimes de Baranger entrent en jeu. Il ne s’est pas seulement contenté de suivre à la lettre les descriptions de H.P. Lovecraft, il s’est complétement approprié toute l’horrible immensité de la créature et du culte qui l’entoure, pour un résultat que j’oserai qualifier de magistral.
Il utilise les couleurs sombres jusqu’à finir par un noir très appuyé ce qui représente excessivement bien l’angoisse du narrateur qui se fait petit à petit happer par les visions d’horreur du récit qu’il est en train de découvrir. L’utilisation du noir permet également de faire ressortir les blocs de texte directement ancrés sur les images, qui se feront d’ailleurs de plus en plus discret pour laisser pleinement la place à l’émergence de Cthulhu.
Très peu d’illustrateurs ont souhaité tenter de mettre à profit leur talent sur des nouvelles de H.P. Lovecraft, tant il est difficile de « représenter l’irreprésentable ». Encore une fois, Baranger a adapté avec brio son coup de crayon pour faire en sorte de ne jamais représenter en détail ni dans son entièreté la créature mystique. Cependant, il nous permet quand même d’évaluer l’immensité de la créature en plaçant dans une illustration des humains à ses pieds qui feront office d’échelle… perso, je n’aimerai vraiment pas être à leur place !
Ce monstre est si immense, si affreux qu’il est tout simplement impossible de réellement l’exposer. Ce qui est également le principe propre à l’horreur, qui fonctionne toujours mieux en laissant s’emballer à plein régime l’imagination du lecteur plutôt que de lui offrir un visuel direct. Baranger relève donc ce défi à merveille car il parvient toujours à garder cette grande part d’ombre et de mystère dans ses illustrations, ce qui les rend d’autant plus effrayantes.
Pour terminer cette nouvelle, H.P. Lovecraft nous fait comprendre qu’une seule issue s’offre à ceux qui ont le malheur de croiser la route du mythe de Cthulhu : sombrer dans la folie. Et c’est sur cette représentation fabuleuse teintée d’angoisse et de paranoïa que Baranger nous offre sa dernière illustration de l’Appel de Cthulhu. Un personnage les yeux blancs fixés dans le vide, crispé sur son fauteuil attendant dans l’ombre le coup de poignard fatal du culte de Cthulhu. Superbe !