Anime

L’Histoire de Trunks, post apo chez Toriyama

 

Avec les collègues trolls on a réfléchi… enfin… pour des trolls quoi, afin de proposer un thème sympathique de semaine avec de jolis articles à la clef, pleins d’amour et de culture et on s’est accordé, après moult borborygmes incompréhensibles, sur le post apocalyptique. Or voilà, votre serviteur avait envie de faire quelque chose qui sorte un peu de l’ordinaire, il avait des velléités de transgression, de tout envoyer cul par-dessus tête, en clair de pas faire comme les copains pour exalter son « moi ». Il a alors pensé, dans un éclair de génie dont il a le secret, à vous parler de Dragon Ball Z. Même les plus hermétiques aux mangas parmi vous devraient alors se dire : « Mais qu’est-ce que c’est que ce pataquès, qu’est-ce qu’il raconte comme conneries, depuis quand Dragon Ball c’est post apocalyptique ?! » Et vous aurez raison… mais pas complètement ! Il existe en effet, à coté de la série animée (la série… on y reviendra…) et du manga d’Akira Toriyama, toute une suite d’OAV (Original Video Animation), en général de bonne qualité et qui traitent d’aventures que nos héros auraient vécu entre les différentes époques de l’Histoire classique.

Trunk01Et précisément, celui dont j’ai envie de vous parler, l’Histoire de Trunks, possède tous les attributs du genre post apo (j’utiliserais dès lors l’abréviation). Pour les newbies complets de Dragon Ball je recommande une cure rapide et intensive de ce manga mythique avant d’attaquer cet OAV (certains pourront chipoter en me disant que ce n’en est pas un vrai et que c’est un Téléfilm d’animation) et cette critique, simplement parce que sinon vous n’allez absolument rien biter. Mais attention fougueux lecteurs, choisissez soit le manga papier, qui reste d’excellente facture, ou alors la série redécoupée et remastérisée, nommée Dragon Ball Kaï, et qui s’est chargée d’en finir avec les kamehaméha de douze épisodes et avec les cinq minutes de Freezer qui en durent soixante (en vérité l’ancienne version était dépendante de la production d’Akira Toriyama et finit par le rattraper, ils durent alors temporiser).

Courez donc, allez voir ce cultissime manga qui aurait dû bercer votre enfance, comme il a bercé celui de la plupart des gens de bien ici bas. Pour les autres je vais devoir parfois lancer quelques spoils pour développer mon propos et montrer combien cet animé s’inscrit dans la thématique choisie. Si vous ne voulez rien en savoir je vous conseille donc un petit visionnage, on se retrouve ensuite.

Timeline et antidote

Notre histoire prend place dans un futur alternatif de l’Histoire classique de Dragon Ball Z. Sangoku, frappé par une cruelle maladie cardiaque, est mort peu avant l’apparition d’une terrifiante menace matérialisée par deux cyborgs créés par le docteur Gero, un ancien ennemi de notre héros qui servait naguère dans l’armée du Ruban Rouge.

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Docteur Gero, généraliste

 

Rancunier, le bonhomme avait poursuivi ses recherches afin de créer des créatures capables de vaincre notre saiyen préféré. C17 et C18, deux jumeaux, humains à l’origine et dès lors transformés en machines à tuer à l’énergie infinie, furent un des couronnement de ces recherches et quand ils débarquèrent liquidèrent la plupart de nos amis (bon pour Krilin et Yamcha rien de bien étonnant) et plongèrent dès lors le monde dans le chaos. Néanmoins vous aurez quelques remarques mes chers lecteurs, simplement parce que dans la trame narrative classique l’épisode des cyborgs n’est qu’une portion du cycle plus vaste de Cell et vous aurez entièrement raison. Et nous touchons par là à un élément fondamental de l’Histoire de Dragon Ball Z ; la création de plusieurs « timeline » parallèles.

Qu’est-ce que c’est que ce machin encore ? Il s’agit simplement de plusieurs déroulés possibles de l’Histoire dues à des voyages dans le temps. Vous vous souvenez peut être de Trunks et de son apparition dans le manga ? Hé bien le bougre venait du futur et arrivait pour sauver Sangoku de sa future maladie en lui donnant un remède de son époque. Par cet acte et en assurant la survie du héros, il venait de créer un nouveau futur, un futur différent du sien, dans lequel Sangoku ne serait pas mort de maladie et où lui-même adulte interviendrait dans les événements. C’est une façon simple d’aborder la question fort épineuse des voyages dans le temps et sur ce sujet je vous recommande chaudement l’émission e-penser sur Youtube qui détaille fort bien la chose.

Apocalypse cyborg

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Tu souffres ?

Or donc, le Trunks que nous voyons à ce moment là n’est pas la crevette morveuse qui engluera bientôt les bras de Bulma mais le jeune homme torturé d’un futur qui n’est déjà plus celui de nos héros. L’OAV que nous abordons ici est donc l’Histoire de ce personnage, dans ce futur alternatif et qui est clairement apocalyptique, d’une apocalypse colorée comme sait l’être Dragon Ball, mais aussi implacable et terrifiante comme le sont ses vilains.

Effectivement, nombres d’images de l’animé, présentant les villes par exemple, ne transcrivent pas les gimmicks habituels du post apo. On voit des gens insouciants dans un décors typiques du manga, vaquer joyeusement à leurs activités… Mais c’est un sublime faux-semblant. Arrivent bientôt les deux implacables humanoïdes mécaniques et la ville se change brusquement en un champ de ruines et de carnage dans lequel les deux créatures font montre de leur froide résolution infantile à tout anéantir par un simple dégoût adolescent de l’humanité. En guise d’anges de la mort nous avons donc deux figures impénétrables au comportement puérile, ce qui est encore plus glaçant. Il est à souligner que dans ce manga nous avons souvent des méchants de qualité ; l’aristocrate suffisant Freezer, le sportif halluciné Cell, le timbré schizophrène Boo… Les cyborgs collent bien à cette galerie des horribles ; leur petits sourires en coin sur leurs gueules d’ange et leurs déconcertante facilité au combat les rendent littéralement implacables.

Sangohan, qui est encore vivant, les affronte bien sûr, mais malgré sa transformation en Super Saiyen il est incapable d’en venir à bout. Mutilé au combat il gagne en charisme (ce qui ne fait pas de mal au personnage ; c’est celui que j’apprécie le moins d’habitude) et rajoute à l’animé une part de tragique que l’on ne rencontre guère autrement. Nos héros peinent toujours face à leurs adversaires mais jamais ils ne se retrouvent dans cette situation désespérée, incapables de vaincre et pourtant résolus à se battre avec pour destin probable une mort inéluctable dans un soleil couchant ou sous un orage…

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L’ambiance, le cadrage…

La fin du monde n’est pas achevée, le monde n’est pas encore totalement détruit. Ce n’est certes pas complètement en accord avec l’idée de post apo, simplement parce que cela se déroule encore. Mais on apprend que près de la moitié de la population mondiale a disparue, victime des cyborgs, ce qui suffit amplement pour justifier cette idée d’apocalypse, d’autant que nous l’avons vue, elle apparaît inéluctable et certaine. D’ailleurs certains plusieurs, derrière le vernis de normalité de la vie, montrent combien le quotidien s’est modifié ; difficulté pour se procurer le nécessaire vital, flash info fatalistes et même Tortue Géniale et Oolong planqués dans un sous-marin… Ce monde est malade d’un mal incurable, de deux parasites implacables que Bulma affronte avec ses souvenirs, accroché au chimérique sourire éclatant du rassurant Sangoku, celui auprès duquel tout semblait possible, celui qui était devenu au fil des histoires le garant de l’ordre du monde pour nos amis, quand bien même le mal s’attache comme une ombre à ses pas, ce qui le poussa dans la trame classique à refuser d’être ressuscité

Trunk02Mais voilà, l’amie de la première heure, désespérée, terrorisée par l’avenir de son fils, place toute son énergie pour créer une machine à remonter le temps pour sauver la vie de celui qu’elle estime être le seul à pouvoir endiguer l’apocalypse et offrir au monde une paix retrouvée. C’est ce qui la fait survivre, c’est ainsi qu’elle occupe son rayonnant génie, sans son exubérance. Les personnages sont effectivement graves et toujours, derrières les quelques passages de détente, plane l’ombre infinie des cyborgs. La pauvre Chichi, dévastée par la perte de son mari souffre l’absence de son fils dont elle pressent le funeste destin dans la lumière finissante du jour… Ainsi est structurée l’ambiance si particulière de l’animé. Son registre narratif, s’il reprend globalement les codes de Dragon Ball, n’en reste pas moins subtilement en décalage.

On ne rencontre vraiment une atmosphère comparable que dans certains moment d’un autre OAV, celui racontant l’Histoire du père de Sangoku, surtout au moment de son duel désespéré contre Freezer. La fin d’un monde se dessine, les espoirs s’amenuisent et la folle équipée des cyborgs ne recouvre pas encore totalement le monde de ténèbres, simplement parce qu’ils sont joueurs en souhaitent faire durer le « plaisir »…

L’atmosphère

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Excellente métamorphose

Dragon Ball possède souvent dans ses adaptations animées une certaine qualité des ambiances servant de cadre à l’Histoire. La descente aux enfers du combat contre Freezer est en cela iconique, même si c’est surtout dans les OAV que cela s’exprime le mieux. Dans l’Histoire de Trunks la lumière et les ombres, de même que la nébulosité, concourent à souligner les enjeux du drame.

Trunks apeuré dans une lumière chaude de jour finissant, déambulant hagard dans les ruines d’un immeuble, dégage des émotions puissantes, d’autant que les silhouettes menaçantes et furtives des cyborgs maintiennent la pression d’un danger de huis-clos. L’animé est rempli de scènes de ce genre. On s’immerge, on ressent l’impuissance et l’accablement des héros et d’un monde qui courent ensemble dans le néant.

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Le crépuscule du monde

A ce titre la transformation de Trunks en Super Saiyen, dans son cadre, son ambiance lumineuse, permet d’en faire une des meilleures de l’univers de Dragon Ball Z. Contrairement à ce que semble nous suggérer l’animé récemment sorti et son matou rose, un Super Saiyen trouve sa genèse dans un chaos d’émotions, dans une colère qui submerge ses sens et transfigure le combattant. C’est dans le délire de souffrance de la perte de Krilin que Sangoku bascule dans cet état, c’est en voyant ses compagnons torturés et un ami des animaux tué (sic) que Sangohan le surpasse… et ces métamorphoses sont à mon sens les plus efficaces, elles nous remuent les sangs et nous mettent face au dilemme du héros qui puise dès lors dans la folie d’une colère gigantesque pour défendre une cause de bien… Cette dualité aurait sans doute mérité d’être un peu approfondie dans Dragon Ball Z, j’avoue que cela a toujours été un regret pour moi alors que les premiers moments de la transformation de Sangoku laissaient présager le meilleur en ce sens. Néanmoins dans l’animé qui nous occupe, on a tout de même une belle réflexion sur l’ivresse de la puissance et ses limites et ça c’est important

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Je sais, je suis dithyrambique, c’est, je crois, le lot de tous ceux qui ont été perfusés dès l’âge tendre au Club Dorothée, et si d’habitude non plus je ne prétends pas à l’objectivité (manquerait plus que ça), dans le cas de Dragon Ball je le suis d’autant moins. Il suffit que retentissent quelques notes de la musiques de l’animé traditionnel pour que je plonge dans un univers d’images, de personnages, de concepts et de morceaux de bravoures… Néanmoins et pour reprendre contenance et taire un peu ma pâmoison de donzelle nostalgique, je dirais que l’Histoire de Trunks est un des meilleurs OAV sur l’univers d’Akira Toriyama, un des plus sombres et des mieux mis en scène. Il est aussi un des plus troublants et l’amateur devrait y trouver une saveur particulière, robuste et rare, qui se savoure d’expérience.

En aparté je signale que avec de petits moyens l’équipe de Robot Underdog monte un projet d’adaptation de cet animé en film avec comme souci le respect du matériau de base. C’est loin de la perfection, mais au vu de ce qu’on nous a servi jusque là c’est prometteur : 

Flavius

Le troll Flavius est une espèce étrange et mystérieuse, vivant entre le calembour de comptoir et la littérature classique. C'est un esthète qui mange ses crottes de nez, c'est une âme sensible qui aime péter sous les draps. D'aucuns le disent bipolaire, lui il préfère roter bruyamment en se délectant d'un grand cru et se gratter les parties charnues de l'anatomie en réfléchissant au message métaphysique d'un tableau de Caravage.

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