Jojo’s Bizarre Adventure : Nom de Dio !
Vous ignorez peut-être un fait important de la vie du Cri, mais en ce moment, les seules interventions de Lazylumps sur le canal de discussion de l’antre se résument à des pleurs du style « Sainté sont des brêles :( » ou « Sainté y z’ont rien fait qu’à perdre :'( » sans oublier « Maieuh, Sainté c’est tout nul :^(« . Dans ces cas là chers lecteurs, ni une ni deux, j’enfile ma combi de survie et je vais au devant du jargon footballistique, hautement nocif au métabolisme troll. Le claque-merde du chef fermé à grand renfort de clous, je lui rappelle qu’il s’agirait de se respecter un peu.
Tâche quotidienne éreintante s’il en est, et pourtant nécessaire à la survie de la société trolle.
Mais voilà, le bougre est rancunier. Alors que je discutais avec ce cher Blorb de la cultitude de l’objet Jojo’s qui nous intéresse aujourd’hui, le chef débaroule comme un pet sur une toile cirée, lâchant sa sentence insidieuse : « Mais en fait Narfi, ta série là, elle intéresse autant le canal que moi qui parle de Sainté ! »
Oh putain.
Mon sang ne fit qu’un tour. Je vis tout blanc, puis tout noir, puis deux fois tout blanc, avant de me ressaisir. Non, assassiner le chef n’était pas la solution. Malgré son côté poil à gratter, il savait souvent se montrer attachant. Et surtout, il ne sait même pas ce qu’est Jojo’s l’animal ! Pardonne-lui Araki, il ne sait pas ce qu’il dit !…
Dans ma mansuétude de traî… de bras droit fidèle, je me dis que convertir la masse à l’œuvre de Sensei Araki était la meilleure façon de combattre une telle insolence.
Prenez la pose les enfants, je vous embarque dans un manga/animé fort bizarre, qui a inspiré entre autre One Piece ou Street Fighter et qui peut se targuer d’être une des œuvres les plus cultes du média. Et oui, je vais à la fois traiter de l’animé (récent) ET du manga. En revanche, je ne traiterai ici que des parties qui ont été adaptées en animé, soit les quatre premières.
https://www.youtube.com/watch?v=caM2hEV69ac
Un Joestar, un Vampire, et un Stand rentrent dans un bar…
Le manga de Hirohiko Araki se sépare en grandes parties, suivant chacune un personnage surnommé Jojo et appartenant de près ou de loin à la famille maudite des Joestar, prononcez Jostar. Attention, spoilers légers à venir…
La première partie, Phantom Blood, se déroule en Angleterre à la fin du XIXe siècle et s’attache à nous présenter le premier Joestar maudit, celui à partir de qui tout déconne dans la famille. Remarquez, ce n’est pas vraiment de sa faute : droit, juste et gentilhomme, Jonathan Joestar a tout du modèle héroïque classique. Non, le problème viendrait plutôt de son frère adoptif, Dio. Sadique, mauvais, Dio est un véritable enfoiré malgré son nom cool.
Le scénar voit rapidement Dio mettre la main sur un ancien artefact Aztèque confiant de terribles pouvoirs à quiconque l’utilise. Jojo, pour lui faire face et l’empêcher de nuire va apprendre à utiliser le Hamon, un pouvoir solaire, sous la direction d’un vieux mentor du nom de William Anthonio Zeppeli.
Si Phantom Blood reste d’un classicisme prononcé, avec son héros héroïquement héroïque (pensez Captain America, mais en Japonais… Enfin non, Anglais, mais… Merde !), elle pose les bases, regorge de moments iconiques, et possède l’un des bad guys les plus jouissifs de la culture japonaise. Vite vu et vite lu, Phantom Blood n’est cependant que peu représentatif de ce qu’est Jojo’s. Mais elle permet au moins de voir d’où est parti Araki dans son œuvre, et de voir l’évolution de son style tant scénaristique que stylistique.
La seconde partie Battle Tendency reprend quelques décennies après ces événements, dans les années 30. On y suit les aventures de Joseph Joestar, jeune américain au caractère très différent de son ancêtre : blagueur, insouciant et cabotin. Maître du Hamon depuis son plus jeune âge, Joseph est amené à combattre une menace pesant sur le monde depuis des millénaires, mais il n’est heureusement pas seul dans sa lutte : un certain Caesar Zeppeli le rejoint pour faire front commun…
Battle Tendency n’est pas le véritable commencement de la série, mais c’est à partir de cet épisode que l’on voit réellement émerger le « Bizarre » dans Jojo’s Bizarre Adventure : entre un combat sur des pieux, des nazis au Mexique, ou encore une baston à base de nouilles enduites de Hamon. Et oui, on retrouve un petit arrière goût nanard prononcé, mais totalement assumé. J’ai dit qu’un nazi devenait un nazi cyborg avant la fin ? Bah voilà.
Mais Battle Tendency inaugure bon nombre d’autres éléments qui définissent désormais Jojo’s. Les combats y sont ainsi des précurseurs de ce qu’ils seront toujours à partir de là dans la série : un véritable affrontement de l’esprit et de stratégies diverses, plutôt qu’une confrontation de force brute. Enfin, Battle Tendency initie la tradition des personnages aux noms de groupes, de zikos ou de chansons : spéciale dédicace à Essidissi (AC/DC) et à Santana. Également assez courte, cette partie est néanmoins bien plus agréable à ingérer que Phantom Blood, car plus originale dans sa narration, avec un délire plus poussé et assumé.
Passons maintenant aux années 80 avec Stardust Crusaders, troisième partie de Jojo’s, et sans doute la plus célèbre et célébrée. On y suit Kujo Jotaro, petit fils japonais de Joseph. Emprisonné de son propre fait car se pensant dangereux pour la société, Jotaro serait possédé par un démon… »Bullshit ! », lui répond son Ricain de papy, venu expressément du Nouveau Monde pour le sortir de geôle ! « Tu n’es pas possédé, tu as juste développé un Stand ! » Diable, mais qu’est ce qu’un Stand ? Une insulte bosniaque ? Nenni ! Un Stand est la matérialisation de l’esprit combatif d’une personne, visible uniquement par d’autres personnes possédant un Stand. Chaque Stand est unique et possède un nom ainsi que des pouvoirs particuliers. Celui de Jotaro, baptisé Star Platinum, est l’un des plus simples et basiques : c’est juste un bourrin ultra rapide et précis, qui a la puissance d’un troupeau de bulldozers dans chaque bras.
Mais papy Joseph n’est pas venu au Japon simplement pour faire la morale au petit-fils. Non. Bien plus grave que ça, Joseph a découvert que DIO, l’ennemi héréditaire de la famille, est de retour. Planqué en Égypte, l’ignoble Némésis récupère petit à petit ses pouvoirs et se prépare à dominer le monde. Si Jotaro est d’abord opposé à l’idée d’aller jusqu’en Égypte pour botter le cul à une entité centenaire dont il se cogne le coquillard, une maladie mortelle se développant chez sa mère et ne pouvant être stoppée qu’avec la mort de DIO le force finalement à partir à l’aventure. S’ensuit une longue odyssée qui lui fera traverser l’Inde, les mers, et la Péninsule arabe. Un voyage qui ne se fera pas sans encombres et sans combattre bon nombre de serviteurs de DIO.
Solitaire, badass as fuck, facilement irritable et taiseux à l’extrême, Jotaro apparait au premier abord comme l’anti-thèse de ses ancêtres. Mais ce caractère difficile (bien que classieux) est compensé par celui de ses camarades de route : entre Kakyoin l’intellectuel, le vieux Joseph qui cabotine, Avdol (prononcez Abdul) l’égyptien serious-business, le français comic-relief Polnareff (cocorico), ou encore Iggy le cabot le plus immonde de l’histoire, on n’a jamais le temps de s’ennuyer.
C’est avec Stardust Crusader que la série entre véritablement dans le dur : les Stands, ces fameuses manifestations spirituelles aux pouvoirs uniques, permettent aux combats d’aller encore plus loin dans la réflexion et la stratégie, captivant l’audience, non pas avec une violence stylisée (quoique les ORA ! qui fusent font toujours leur petit effet), mais avec un véritable affrontement de l’esprit entre deux personnes. En cela, le combat contre D’Arby, se jouant autour d’une partie de poker où chacun mise son âme, reste l’un des plus incroyables et des plus captivant que la série nous ait offert. Mais les combat plus classiques du Shonen, comme celui face à Vanilla Ice par exemple, ou l’épique combat final, ne déméritent pas pour autant.
Finalement, l’une des grandes forces, et peut-être la plus grande qui se dégage de Stardust Crusaders, c’est l’attachement émotionnel qui se crée vis à vis de ses personnages. Si on ne suivait que le personnage central de Jojo dans les précédentes parties, ici, on suit le parcours de six personnages, qui vont chacun évoluer au fil de l’aventure, de façon parfois brutale, souvent émouvante.
La quatrième partie du récit, Diamond is Unbreakable, se déroule en 1999, dans la petite ville japonaise de Morioh. Jotaro, qui s’est pris 10 ans dans la gueule, y vient à la recherche de Josuke Higashikata. Le jeune homme calme et serviable possède un Stand, Crazy Diamond, capable de soigner n’importe quelle affection ou blessure. Mais c’est aussi et surtout l’oncle de Jotaro, malgré ses 15 ans. Et oui, le vieux Joseph Joestar se révèle plus volage qu’on ne le croyait…
Mais quelque chose se trame dans la petite ville de Morioh. Les utilisateurs de Stands alliés comme ennemis semblent s’y multiplier…
Encore une fois on se réjouira des personnages secondaires décalés, des combats toujours plus inventifs avec des Stands toujours plus craqués, et d’un grand méchant d’un niveau au moins égal au fils de pute interstellaire qu’est Dio, bien que dans un style tout autre. C’est vrai quoi, après tout il veut juste vivre tranquille et dormir paisiblement… Le style de dessin commence également à virer un peu vers de nouveaux horizons, se coupant complètement des trois premières parties dans sa finalité. Bref, c’est dans la plus pure continuité de Stardust Crusaders, sans voyage néanmoins, puisqu’on ne bougera jamais de Morioh.
À noter que Diamond is Unbreakable est sans doute l’animé Jojo’s avec la meilleure bande-son, avec des morceaux déjà cultes et utilisés comme meme à plus soif, mais on en reparlera…
T’as le style Jojo
Bon vous devez avoir remarqué avec les quelques vignettes ci-dessus, mais la patte graphique de Jojo’s, tant dans le manga que dans l’animé est très particulière. Si elle évolue constamment entre les différentes parties (on a du mal à reconnaître le même dessinateur pour Phantom Blood et Diamond is Unbreakable), on retrouve quand même plusieurs éléments, entre les corps masculins hyper virilisés, ou surtout, le design des vêtements stylisé à l’extrême. La casquette de Jotaro fusionne avec ses cheveux, alors même qu’une énorme chaine pendouille du col de sa veste ; l’uniforme scolaire de Josuke forme un cœur sur sa poitrine alors que le revers de sa veste est envahi de pins divers et variés…
Toujours du côté du manga comme de l’animé, Jojo’s est rempli de moments iconiques où les personnages tapent la pose dans des positions parfois à la limite de ce que permet l’anatomie humaine. Là encore, ce qui peut choquer lors des premières lectures devient rapidement un marqueur de la série. Et des poses au premier abord ridicules, permettent en fin de compte d’amplifier certains moments clés.
En parlant de moment clé, n’oublions pas de souligner les balls d’Araki, qui n’hésite pas à tuer à la pelletée les personnages : la mort n’est jamais loin dans Jojo’s, et les personnages principaux comme secondaires peuvent y succomber pour une simple faute d’inattention ou durant un moment de faiblesse. Ou parfois, gratuitement. Et c’est d’autant plus déchirant de voir un personnage adoré se faire éventrer sauvagement, juste parce qu’il a la malchance d’être le premier à tomber face à un Stand encore inconnu… En cela, Jojo’s est aussi une leçon sur le deuil et sur les aléas de la vie : parfois, même les plus grands efforts du monde ne pourront vous sauver ou arranger les choses.
Enfin, parlons un peu plus d’une particularité de l’animé : sa musique et son montage. Les musiques de Jojo’s sont parmi les meilleures qu’il m’ait été donné d’entendre, entre thèmes appuyés et jeu sur les leitmotiv, particulièrement avec celui de Jotaro ou encore avec celui de Kira. Mais ce qui est sans doute le plus réussi, c’est l’utilisation des chansons de fin d’épisodes. On a en général affaire à des bon tubes rocks connus : Roundabout de Yes résonne pour Phantom Blood et Battle Tendency, et est utilisé de façon bien putassière et marquante à de très nombreuses reprises. Comme par exemple, lorsque Zeppeli se prépare au combat dans Phantom Blood.
Et si Walk Like an Egyptian des Bengals rythme la première partie de Stardust Crusaders, celle où nos personnages sont insouciants et avancent vers l’objectif, une fois arrivés au Caire et alors que la fin de l’aventure se fait proche, ce sera Last Train Home du Pat Metheny Group qui viendra clore chaque épisode dans une mélancolie de plus en plus appuyée…
Jojokes… Jojokes everywhere.
Mais l’influence de Jojo’s, on en parle ou bien ?
Loin d’être un manga anodin, l’intelligence des combats de Jojo’s, mais aussi son style si particulier en ont inspiré plus d’un. Les Stands, ces génies de combats aux pouvoirs différents et uniques, peuvent être mis en parallèle avec les Personæ de Persona, mais également et de façon beaucoup plus directe, avec les fruits du démon de One Piece. Ces derniers confèrent en effet à leur consommateur un pouvoir unique qui peut au départ paraître tout pourri (un homme caoutchouc sérieux), mais qui se révèle véritablement avec un peu de maîtrise et beaucoup d’intelligence et d’imagination. Jusqu’à devenir un pouvoir complètement craqué (Luffy OP pliz nerf).
In fine, les Stands ont eu sur le Shonen une influence marquante et durable, en forçant les auteurs à raisonner en terme de particularité des personnages, de pouvoirs et d’interactions, plutôt qu’en simple terme de force brute et/ou de volonté. Et l’on retrouve encore cette influence de nos jours avec des mangas nouveaux comme My Hero Academia, qui semblent totalement avoir assimilés cette « règle » désormais assez ancrée dans le paysage du manga.
Pour une mauvaise utilisation de ladite « règle », ne pas regarder Fairy Tail.
Du côté de l’influence graphique, elle se retrouve très nettement du côté par exemple des jeux de combats ! Le design du personnage de Guile, issu de Street Fighter, provient directement de Stroheim, Nazi présent dans l’arc Battle Tendency et « ennami » de Joseph. On trouve également des références à Dio dans les Castlevania (tiens donc…).
Mais si Jojo’s est devenu un phénomène de niche en Occident, c’est surtout par la passion des fans, ces derniers n’hésitant pas à faire des mèmes à tout bout de champ avec ce que propose la série et le manga. Il faut dire qu’entre les poses lascives, les moments classieux, les répliques cultes à tire larigot, l’engrish à ras bord…, il y a de quoi faire !
Tous ces petits éléments de Jojo’s font le bonheur des fans et des internets. Parmi les mèmes les plus connus d’internet, on retrouve le To Be Continued, parodiant la façon putassière avec laquelle se terminait la majorité des épisodes de Phantom Blood et Battle Tendency, juste avant qu’un truc gravissime ne se passe…
Dans le même style, le thème de Yoshikage Kira de Diamond is Unbreakable est devenu une sorte de Guile Theme du malaise, rendant n’importe quelle situation grandiosement malsaine…
https://youtu.be/daBJLaEdE0E?t=20s
Mais on en oublie plein : le Awaken des Pillar-Men, le Beautiful Duwang de Kira, l’Engrish de Joseph, le Polnareff IRL, les mèmes sur Sheer Heart Attack et ses pouvoirs, Araki Forgot… J’en passe, et des meilleurs.
Et c’est aussi une des grandes forces de Jojo’s, et une des raisons pour lesquelles on peut chaleureusement remercier la série animée : celle-ci a permis une démocratisation de l’œuvre, et en conséquence directe, une multiplication des contenus amateurs et autres blagues sur le net. Aimer Jojo’s n’a jamais été aussi bon qu’aujourd’hui, à l’heure où l’internet peut vous fournir encore et encore des jojokes à vous faire tordre de rire devant la géniale stupidité des fans.
Œuvre culte et absolument indispensable à la biblio-vidéothèque de n’importe quel amateur de japoniaiseries qui se respecte, Jojo’s Bizarre Adventure n’échappe bien évidemment pas au macaron coup de cœur ! S’il en restait parmi vous qui ignoraient encore la magie d’un tel manga, c’est maintenant chose réparée. Lire Jojo’s, c’est partir en voyage aux côtés de personnages marquants, dans un univers étrange où les combats se règlent autant à coup de bulles de savon que de mandales dans la gueule. Et regarder l’animé, c’est prolonger le plaisir avec style, des doublages parfaits, et des musiques au diapason.
Bref, foncez, il n’est pas encore trop tard !