Mindhunter : Serial Fincher

Vendredi 13 Octobre (date fort bien choisie au demeurant), sortait Mindhunter, la nouvelle série Netflix du maestro Fincher. Pas vraiment surprenant pour les fans du réalisateur, on s’intéresse ici à la psychologie humaine et plus précisément, à la psychologie des serial killers. Mindhunter se focalise en effet sur les premières études menées par le FBI afin de mieux comprendre l’esprit tordu de ceux que l’on nomme encore les sequential killers
Nous contant les interviews et enquêtes menées par les agents du FBI à la fin des années 70, la série se concentre sur ces individus qui sacrifient un peu de leur sanité pour côtoyer et interroger des personnages affables, capables de parler salades, chaussures, ou encore de la fois où ils ont niqué la trachée du cadavre de leur mère fraichement décapitée.
La bonne ambiance !

Je crois que nous avons affaire à un sewial killah *TSOUIN*

Attention, Spoil des 6 premières minutes du premier épisode :
La série s’ouvre à Braddock (faites attention à pas y mettre les pieds) en Pennsylvanie, alors qu’une prise d’otage est en cours. Le FBI est rapidement dans la boucle, et on découvre la situation à travers le point de vue d’un des agents du Bureau, spécialisé en négociation : le présidentiable Holden Ford (Jonathan Groff). S’ensuit une tentative de sa part de désamorcer la situation, en essayant de mieux cerner la psychologie du preneur d’otage clairement en pleine crise mentale. Si la situation se conclut sur une note amère, elle permet une prise de conscience chez Holden concernant les lacunes du FBI vis à vis de la psychologie, générale comme criminelle.
Fin du Spoil.

Commence à partir de là une quête mené par Holden pour mieux cerner la psyché des nouveaux prédateurs qui parcourent l’Amérique. L’affaire Manson est encore fraîche, les tueurs « fous » commencent à terroriser la populace et les flics sont bien souvent démunis face à des meurtres qui apparaissent comme dépourvus de tout motif. Rapidement, Holden se retrouve nommé assistant de Bill Tench (Holt McCallany). Membre de la Behavioral Sciences Unit, celui-ci est chargé de parcourir l’Amérique et de faire découvrir aux nombreux policiers de son territoire les nouvelles méthodes du FBI ainsi que les difficultés apparaissant avec les tueurs en série. Holden a rapidement une idée brillante : celle d’interviewer les serial killers des États traversés par le duo, afin de mieux les comprendre, et donc de pouvoir cerner le profil d’éventuels tueurs encore en liberté.

Le duo de choc : Bill et Holden/Macron.

Holden et Bill partagent alors leur temps entre interviews sous haute tension avec tueurs au modus operandi bien souvent ignoble, et enquêtes retorses dans lesquelles leurs nouvelles connaissances les aident à soulager une flicaille dépassée par les évènements. Si la série se focalise principalement sur ces deux axes, elle n’en oublie pas pour autant de développer ses personnages : la vie privé d’Holden et l’exploration de son caractère complexe (bouffé par l’ambition et l’orgueil), ou encore le développement de l’unité, avec l’arrivée assez rapide de la docteure Wendy Carr (Anna Torv), et toutes les complications qui vont avec.

Le trio du swagg : Holden, Wendy et Bill. Encore dans un ascenseur.

Serial Isateur

Bon mais qui dit série de Fincher, dit série réalisée au moins en partie par le pote Dave. Pour Mindhunter, Fincher se charge de la réalisation des deux premiers épisodes ainsi que des deux derniers. Bien entendu, on retrouve le style du maitre dans la réalisation : entre la caméra qui suit les personnages dans leurs moindres mouvements ou hochements de tête, et une composition des plans chiadée. Bon, on est pas chez Anderson non plus, mais les connaisseurs de Fincher savent de quoi que j’cause. Y a qu’à voir plus haut. Ou juste en dessous.

La propretéy d’un style.

Et les autres épisodes alors ?
Et bah c’est du tout bon ! Quelque part, rien de très original : les réalisateurs des épisodes restants (Asif Kapadia, Tobias Lindholm et Andrew Douglas) faisant bien souvent dans l’imitation du style Fincherien. Pour autant, rien n’est à jeter : les deux scènes qui m’ont le plus marqué visuellement proviennent de ces épisodes là. C’est dire. Entre un enchainement de plans « regards qui tuent », et une scène d’ascenseur à la composition diablement efficace, les « petits » font un excellent taff.

En tous les cas, le style de Fincher, original ou imité, s’adapte parfaitement à nos histoires de serial killer (pour ceux qui avaient un doute, vous n’avez pas dû voir Zodiac. Pour ceux qui avaient un doute en ayant vu Zodiac, vous êtes cliniquement mous du bulbe, rendez-vous à l’hôpital le plus proche). La première scène de discussion entre Holden et un tueur en série est un énorme morceau de tension, souligné par une caméra minimaliste, ne bougeant que lors des déplacements du tueur, comme pour troubler la tranquillité ambiante par ses mouvements. Elle s’attarde également sur son visage, pointant le fait qu’il ne cligne presque jamais des yeux, amplifiant également ses moments de silence pour entériner la gêne et l’inconfort que celui-ci provoque.
Bref, si l’interrogatoire de Zodiac vous avait marqué, préparez-vous, Mindhunter est truffée de scènes du même acabit !
Toute cette ambiance visuelle oppressante est de plus soulignée par une bande-son qui fait son petit effet. Il n’y a qu’à écouter le générique pour s’en convaincre.

Based on True Events

L’une des choses les plus troublantes à propos de la série, c’est qu’elle est adaptée d’évènements réels. Le personnage d’Holden Ford est ainsi basé sur celui de John Douglas, tandis que Bill Tench s’inspire de Robert Ressler (mais appelons-le Bob). Tous deux sont des anciens du FBI, pontes de la psychologie criminelle, Bob étant même le père supposé du terme serial killer. Wendy Carr est quant à elle, basée sur la docteure Ann Burgess, spécialisée dans le traitement des traumas, ce qui ne l’a pas empêché de collaborer avec le FBI, en étudiant le lien que l’on pouvait faire entre maltraitance enfantine et délinquance juvénile, voire avec des crimes plus tardifs. 

Mais c’est plus particulièrement Douglas qui nous intéresse ici. L’homme s’est chargé, dans les années 70, d’interviewer un maximum de Serial Killer, afin de mieux comprendre leur esprit retors. Parmi les interrogés, au nombre de 36, on compte : Edmund Kemper (que l’on voit à de nombreuses reprises dans la série), Ted Bundy, John Wayne Gacy ou encore la « star » de l’époque, Charles Manson. Les informations récoltées pendant ces entrevues permettront la publication du Crime Classification Manual (1992), un manuel à l’adresse des agents du FBI et permettant de classifier rapidement et simplement le genre de tarés auxquels on a affaire, facilitant d’autant plus la traque de ces criminels « nouveaux ». Rédigé avec l’aide de Ressler et de Burgess, ce manuel est encore aujourd’hui la référence ultime en ce qui concerne la compréhension des violent crimes, bien qu’une nouvelle édition, en 2006, y ait rajouté plus de 155 pages.

Mais ce n’est pas le seul ouvrage écrit par Douglas. Ce dernier a aussi raconté sa vie et la traque des serial killers dans plusieurs livres, dont le premier, publié en 1995, s’intitule… Mindhunter : Inside the FBI’s Elite Serial Crime Unit. Ouvrage qui a bien sûr hautement influencé la série dont on cause aujourd’hui. Et si les noms des personnages ont été modifiés dans la série, comme on l’a dit plus haut, ce n’est pas le cas des tueurs dont les noms comme les crimes sont préservés, comme pour nous offrir une plus grande authenticité, d’autant plus dérangeante vis à vis de meurtriers ayant réellement existé et terrorisé l’Amérique.

À titre de comparaison, voici Edmund Kemper en vrai/dans la série.

Mindhunter est une des meilleures séries originales Netflix, sans l’ombre d’un doute : entre scénario captivant et personnages fascinants, on en oublierait presque la maitrise totale de la réalisation. Fincher apporte sa touche, toujours aussi sobre, toujours aussi propre, en un mot, parfaite pour qui aime son style. Les autres réalisateurs s’en sortent également avec bien plus que les honneurs, nous offrant une partition de haut vol.
Portée par des acteurs phénoménaux, une musique intense et une réalisation malaisante bien que maitrisée, cette plongée dans la psyché des tueurs ne vous laissera pas indemne.

 

Narfi

Narfi a été accueilli au sein du Cri malgré sa nature de troll des forêts du Périgord, une sous espèce cohabitant rarement avec ses cousins des plaines Limougeaudes (Petrocore constituant la seule exception connue des Trollologues) Crasseux et vulgaire, poète dans l'âme, il aime à rester au fond de la tanière pour lire des bédés et jouer sur son PC, insultant de sa bouche pleine de poulet frit tous ceux croisant son chemin dans les dédales des internets.

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